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samedi 30 avril 2016

Kiki la petite sorcière (long métrage animation)

comme c'est la semaine "sorcellerie" sur mon autre bog, et qu'après avoir vu pas mal de bons films mais aux thèmes très sérieux et violents, j'ai eu comme une envie d'un dessin animé, tout gentil, tout mignon, sans drame, sans violence..

et j'ai logiquement ressorti Kiki la petite sorcière, un Miyazaki un peu ancien (1989), pas encore aussi ambitieux que ses grandes productions des années 90/2000, mais qui me donne toujours la pêche.

Kiki est vraiment la sorcière la plus chou de l'histoire du dessin animé. Dans sa famille on est sorcière de mère en fille, et toute sorcière qui veut être reconnue comme telle doit, à l'âge de 13 ans, quitter sa famille pendant un an pour vivre indépendamment, se trouver un endroit qui lui plait et trouver sa voie, son talent spécial, un travail qui l'intéresse...

Kiki a donc l'âge requis et se décide à partir pour son apprentissage de sorcière. En avant, avec la tenue noire régementaire des sorcière, le balai volant, et Jiji, son chat noir.

Ce qu'elle souhaite: une ville assez grande , près de la mer. La seule condition : qu'il n'y ait pas déjà de sorcière établie à cette endroit. Elle se trouve donc une ville portuaire, qui ressemble pas mal à l'Italie de Porco Rosso.
Mais la ville la déçoit un peu: jolie mais les habitants ne semblent pas vraiment y apprécier les sorcières ( bien que leur existence ne les étonne pas plus que ça. Les réactions sont surtout de l'indifférence, plus ou moins polie, à l'enthousiasme gênant de Tonbo ( Littéralement " Libellule"), un gamin passionné par tout ce qui vole et qui veut absolument devenir ami avec Kiki, de manière pour le moins envahissante.
Loins de l'accueil à bras ouvert qu'elle espérait, elle est prête à baisser les bras et à chercher une autre ville, lorsqu'elle rend par hasard service à madame Osono, boulangère enceinte qui ne va plus pourvoir travailler bien longtemps. entre Osono qui a besoin de repos et Kiki qui a besoin de travail, un accord se fait vite: Kiki sur son balai volant pourra faire des livraisons, pour la boulangerie ou pour des clients particuliers, en échange du logement.

On suit donc Kiki, dans la découverte de sa nouvelle ville, de sa nouvelle vie. Et le lieu qui à première vue semblant un peu déçevant, se révèle plein de surprise et d'habitant plutôt farfelus: une vieille dame et sa domestique tout aussi pagée mais passionnée d'aventures et de faits divers dramatique, qui se débattent avec des ustentiles de cuisine hors d'âge, une dessinatrice retirée dans la forêt en quête d'inspiration (marrant d'ailleurs, elle explique être venue là pour trouver son propre style, parce qu'elle ne faisait que copier celui des autres.. or son propre style ressemble comme deux gouttes d'eau à du Chagall :D),

apparemment il s'agirait d'un dessin fait par des élèves d'une école pour "enfants difficiles" et retravaillée par l'équipe du film, mais le résultat me fait complètement penser à du Chagall
et Tonbo donc, et ses inventions aussi dangereuses qu'improbables, comme le vélo à hélices.
ho j'ai trouvé Charlie ( il ne lui manque qu'un bonnet et c'est bon...)

Mais Kiki doute, manque de confiance en elle, et ça c'est le pire pour une sorcière: perdre son assurance, c'est aussi risquer de perdre ses pouvoirs magiques. Et perdre confiance ça arrive vite, lorsqu'on est isolée dans un lieu où on ne connait pas grand monde. Il va donc lui falloir s'intégrer à la communauté en y trouvant sa place, et accepter de ne pas rester sur ses premières impressions pour se faire des amis, car même les sorcières ont besoin d'avoir des amis! En cas de crise, ça aide bien à remettre les choses en perspective.


Un film simple, sur les petites joies et déconvenues du quotidien, où la sorcière est finalement une fille très normale, hormis son aptitude à voler sur un balai, et les gens normaux un peu... hors normes.
Pas mon favori, mais je lui trouve un charme très agréable et j'aime bien le revoir quand je n'ai pas trop le moral, ou comme je le disais quand j'ai vu pas mal de choses trop sérieuses et que j'ai envie d'un peu de légèreté.

jeudi 28 avril 2016

Rétrospective Kurosawa (hors série) - Ran ( film 1985)

Hors série, parce que comme Kagemusha, il n'était pas au programme de la rétrospective officiellement, pas plus que Kagemusha d'ailleurs, mais mon ciné d'art et d'essai a complété la programmation.

Attention, là on s'attaque à du très très gros, du film à grand spectacle, totalement épique.C'était déjà le cas avec Kagemusha tournée 5 ans plus tôt, Ran pousse le concept encore plus loin. J'avais trouvé que Kagemusha était très bien mais accusait un léger coup de mou vers le milieu ( sur un film de 3h00, ça peut arriver où alors c'était moi qui ai eu un coup de mou en plein milieu d'après midi au bout d'une heure 30. Je n'ai pas encore rédigé le billet, mais ça va venir, priorité à Ran)
Là, pas de risque, en plein milieu une séquence de bataille totalement épique  requiert toute notre attention.
C'est même la première fois depuis longtemps que j'ai entendu des spectateurs réagir à un film en poussant des "hooo!" et des " nooon?" et même un " ho putain!!" pendant la séance.

ikimashô!

Donc, Ran ( 乱, le traducteur en ligne me donne " désordre , chaos, révolte") arrive sur la fin de la carrière de Kurosawa, et , bien qu'il ne soit pas son dernier film, il est peut être son dernier aussi célèbre. A noter que c'est une coproduction Franco-japonaise ( comme Kagemusha auparavant avait été produit par Francis Ford Coppola et George Lucas.. oui, rien que ça), et vu le nombre de décors, costumes, figurants.. il fallait bien ça..

Mais de quoi ça parle? Et bien une fois de plus, Kurosawa s'est tourné vers Shakespeare. Les salauds était une variation sur Hamlet, Le château de l'araignée adaptait assez fidèlement Macbeth, Ran transpose dans la période Sengoku, le roi Lear. Et une fois de plus ça marche, à en juger par les réactions des gens dans la salle.

Donc contrairement au roi Lear, qui avait trois filles, le seigneur de guerre Hidetora Ichimoji a trois fils, sobrement nommés  Taro, Jiro, et Saburo ( en japonais: premier, deuxième et troisième. Pour l'anecdote, les bannières de chacun correspondent à leur noms: Taro ( n1) a une bannière jaune rayé d'un trait. Le Kanji pour "un " est  一;  la bannière de Jiro ( n°2) est rouge avec 2 traits. Le Kanji pour  deux est: 二. et la bannière de Saburo (N°3) est donc bleu clair avec 3 traits. je vous le donne en mille , le Kanji pour 3 est 三. Impossible de se tromper en voyant les armées, même de loin, elles portent toutes des bannières au nom et à la couleur de leur chef).

 Les deux aînés sont mariés, le troisième est célibataire.

Hidetora commence à se faire vieux, 70 ans, un âge plus que respectable pour un guerrier. Au cours d'une partie de chasse destinée entre autre à décider , parmi deux seigneurs ayant chacun une fille à marier,celle qui épousera Saburo, Hidetora prend tout le monde de court: Le projet de mariage il s'en fiche un peu, et décide d'abandonner le pouvoir au profit de Taro, son fils aîné qui sait si bien parler. Dès lors ce sera lui le chef du clan Ichimonji, les deux autres fils recevront chacun un des deux autres forts du fief et devront allégeance à leur frère. Quand à lui, il garde son titre de seigneur de guerre, une petite partie du fief principal et une garnison d'une trentaine d'hommes.

Saburo, qui est le plus critique avec cette disposition et qui connait bien le caractère manipulateur de ses frères tentent d'avertir son père - qui n'était pas un personnage bien recommandable et a pas mal de sang sur les mains - qu'en quelque sorte les chiens ne font pas des chats et qu'une telle disposition ne peut qu'aboutir à un désastre. Evidemment le colérique Hidetora ne veut entendre que des choses agréables et bannit sur le champ Saburo et le seigneur Tango, qui soutenait l'opinion de Saburo. Sans se rendre compte un instant qu'il vient de se priver de ses seuls soutiens.
Car aussitôt dit, aussitôt fait, Taro prend le pouvoir et fait vite comprendre à son turbulent père qu'il a intérêt à se faire oublier s'il ne veut pas se retrouver chassé. Réaction: pas la peine, je m'en vais chez Jiro, lui au moins à le sens de la famille.
Sauf qu'évidemment, Jirô prend l'excuse de ne pas recevoir son père parce qu'il est accompagné de toute sa suite, armée, concubines, servantes et bouffon compris.
le bouffon, le seul qui se permette de dire ses quatre vérités au seigneur sans risquer sa vie. Un personnage passionnant.

Bon, ben.. il ne reste plus qu'à aller au troisième château, celui qui devait être donné à Saburo avant qu'il ne soit déshérité. Mais évidemment, les deux aînés ne l'entendent pas de cette oreille et assiègent littéralement le camp retranché de leur père, dans un assaut de violence assez inouïe (qui a fait censurer le film à sa sortie en Allemagne: trop de sang), au cours duquel toute la suite d'Hidetora est tuée, lui seul en réchappe et part errer, devenu à moitié fou sur la lande, en compagnie du bouffon qui seul ne l'avait pas suivi dans une entreprise qu'il devinait suicidaire.
Tatsuya Nakada qui tenait déjà le rôle titre dans Kagemusha, est excellent dans ce rôle exigeant.


Taro meurt aussi dans l'assaut, donnant donc le champ libre à Jiro pour devenir le seul seigneur du clan Ichimonji. Manipulé au passage par Kaede, l'ambitieuse veuve de son frère qui devient sa maîtresse dans le but d'arriver à la ruine totale du clan. Car Kaede est une femme violente, brutale, mais surtout animée d'une volonté maladive de vengeance envers hidetora, responsable de la mort de sa propre famille ( au contraire de Sue, la femme de Jiro, qui bien que dans le même cas, a préféré se réfugier dans la religion , plutôt que dans la folie meurtrière). Et au cours de son errance, Hidetora, qui alterne dépression, folie et période de lucidité, semble rattrapé par son passé sanglant: hébergé par un ermite, il s'avère que cet ermite est en fait le frère de Sue, qui a réchappé au massacre mais a eu les yeux crevés..
Seul le bouffon, le seigneur Tango et Saburo semblent encore se soucier de ce vieillard à moitié fou qui erre sur la lande.

Et cette tragédie Shakespearienne transposée donc marche très bien, en élaguant les intrigues secondaires, comme c'était le cas pour Macbeth pour n'en garder que le coeur: la tragédie familiale, la trahison,  la lutte pour le pouvoir, la folie meurtrière qu'elle entraîne, la folie tout court...
Avec une petite notion bouddhiste quand même: impossible de prendre fait et cause pour Hidetora, qui a été un monstre dans son passé et le paye en retrouvant face à lui des gens dont il a lui-même causé la perte. Question de karma.
J'aime énormément le personnage du bouffon et sa relation très complexe avec celui pour qui il faisait le fou et qu'il devait amuser, mais qu'il ne peut se résoudre à abandonner. Car il ne connaît mieux que quiconque et ne voit plus le seigneur de guerre, juste le grand-père trahi par tout le monde.

 Il est le seul à vraiment s'apitoyer sur le sort de ce bonhomme.. et au final à se comporter plus comme un fils que ses fils réels ( Saburo excepté qui ne peut qu'agir à distance). J'aime beaucoup aussi le personnage de l'aveugle ( oui, je me suis demandée, une fois sa soeur partie, ce qu'il allait advenir de lui, isolé en hauteur sur une muraille en ruine. Pardon, mais la frangine n'avait pas beaucoup réfléchi au problème). Dans le registre opposé , j'ai aussi beaucoup apprécié Kaede, la femme manipulatrice et violente, qui va jusqu'au bout de sa logique. Le genre de personnage qu'on adore détester.

Sinon, ça y est: pleine maîtrise de la couleur (je l'avais trouvée un peu moins aboutie sur Kagemusha), décors naturels époustouflants, maîtrise des cadrages. Je crois que c'est vraiment celui que j'ai préféré des 7 vus jusqu'à présent. Vraiment, vraiment magnifique ( je pensais l'avoir vu, auparavant, et en fait non, ça m'aurait marquée, j'ai du confondre les titres)

Pour la deuxième anecdote: la dame assise derrière moi au cinéma trouvait en sortant que " c'était bien, mais un peu violent quand même".

Ben, oui,c'est une adaptation du Roi Lear, même sans l'avoir lue avant, je connaissais les thèmes généraux, ce n'est pas une pièce inconnue loin de là, on le sait que c'est violent come histoire, faut se renseigner un minimum avant d'aller au cinéma!
Et pour voir du joyeux, opter, je ne sais pas, pour Beaucoup de bruit pour rien, La mégère apprivoisée ou Le songe d'une nuit d'été, mais pas une tragédie.
Encore moins une aussi sombre, à côté de laquelle Hamlet paraît presque modeste. je me demande ce qu'elle aurait dit si elle avait vu " Titus Andronicus" : " c'était bien mais un peu violent quand même et ça m'a coupé l'envie de manger des tourtes jusqu'à la fin de mes jours"?

jeudi 21 avril 2016

Rétrospective Kurosawa (5) - Vivre dans la peur ( film 1955)

Encore un sujet social cette fois, une décennie a passé depuis la fin de la guerre, mais c'est toujours d'elle qu'il s'agit, via le traumatisme collectif de la population qu'à causé la bombe atomique.


Traumatisme qui prend une dimension de névrose de plus en plus incontrôlable pour Monsieur Nakajima, directeur d'usine, devenu de plus en plus paranoïaque et qui s'est convaincu qu'émigrer est la seule solution pour éviter une nouvelle bombe.
Rien ne peut l'en faire démordre, ni l'échec de sa précédente tentative aussi comique que tragique ( construire un abri nucléaire à Hokkaïdo pour éviter les radiations venues du sud, opération coûteuse qui a failli ruiner toute la famille, pour tourner court lorsqu'une rumeur d'irradiation venue du nord lui a fait abandonner le projet), ni l'opposition de ses proches, légitimes ou pas .
Car au delà de sa famille officielle: une femme et 4 enfants adultes, Monsieur Nakajima cachait plusieurs maîtresses et trois enfants illégitimes.
Il n'empêche, tout ce petit monde partira au Brésil, le chef de famille l'a décidé. Le Brésil, c'est calme et loin des bombes, un compatriote déjà parti là bas lui assure que c'est idéal, une ferme l'attend qu'un japonais désireux de revenir au pays accepte d'échanger contre un terrain au Japon - pas l'usine, qu'il va falloir revendre pour acheter les terrain à échanger, vous voyez le trafic compliqué? - il n'y a aucune raison de ne pas vouloir y aller?
Sauf que..

Bien évidemment, personne ne croît à la réussite de ce nouveau projet irréalisable: embarquer enfants légitimes et illégitimes ensembles, épouse et les 2 maîtresses encore vivantes... il n'est même pas garanti que tout ce petit monde ne s'entretue pas avant l'arrivée, vu la manière très peu calme - et drôle pour le spectateur - dont ils manquent en venir aux mains au tribunal, car évidemment l'épouse légitime et les enfants voyant planer le risque de perdre à la fois leur travail et leur lieu de vie avec la revente de l'usine, qui seule permettrait un tel voyage, ont carrément décidé de faire reconnaître le père comme fou et le faire placer sous tutelle avant qu'il ne dépense jusqu'au dernier sou.Oui , mais une mise sous tutelle serait couper les vivres aux maîtresses et enfants naturels qui touchent une rente mensuelle. Zéro chance que la famille officielle la maintienne, dans ce cas là.

Projet irréalisable, mais également irréaliste, car comme le fait remarquer un personnage, il n'y a pas un seul endroit du globe qui soit à l'abri des bombes.  Et puis emmener sa famille c'est bien, mais vendre l'usine, c'est mettre à la rue les ouvriers qui resteront eux , exposés au danger, c'est mettre en danger le type avec qui il compte troquer la ferme, etc... impossible de protéger tout le monde. Les plaisantins finissent même par lui conseiller d'émigrer sur une autre planète, ce que Monsieur Nakajima devenu complètement fou, prendra au pied de la lettre.

Et pourtant il n'est pas le seul à avoir peur: le traumatisme est collectif, certains vivent avec en domptant leurs peurs, d'autres voient des bombes dans le moindre éclair ou entendent des alertes de raid aériens dans la moindre sirène d'usine.
Et surtout la peur est aussi contagieuse qu'un virus, la fin ouverte laisse planer le doute, mais à travers cet exemple unique et excessif, c'est toute une génération qui a du mal à se remettre de la bombe. Certains essayent de s'en sortir par l'humour et le sarcasme, d'autres par le travail, d'autres ne peuvent simplement pas faire face.

Et c'est encore une fois Toshiro Mifune qu'on retrouve, acteur fétiche de Kurosawa, dans le rôle de l'irascible et grognon M. Nakajima qui se laisse submerger par une peur panique qu'il refuse d'avouer et de s'avouer, au point de sombrer dans la folie ( chose surprenante: le film date de 5 ans avant Les salauds, avec le même acteur.. qui, maquillage aidant, donne l'impression d'être sexagénaire alors qu'il n'a que 35 ans... Vérifiez: le film date de 1955, l'acteur est né en 1920. Ses métamorphoses physiques de film en film sont surprenantes)
oui, cet acteur a en réalité 35 ans...
 Pour mémoire, le même dans les salauds, 5 ans plus tard, donc âgé de 40 ans.
Je trouve ça quand même assez impressionnant...

Et maintenant, le film prend une dimension encore plus contemporaine et glaciale.
Tourné 10 ans après les attaques d'Hiroshima et Nagasaki, mais entre temps, il y a tout juste 5 ans,  il y a eu la catastrophe de Fukushima pour nous rappeler que le nucléaire, qu'il soit militaire ou civil est loin d'être une chose sans danger, et qu'un séisme et un tsunami peuvent à tout moment entraîner une catastrophe démesurée pour peu qu'il se produise au mauvais endroit. Ca n'est pas passé loin il y a encore quelques jours...

mercredi 20 avril 2016

Rétrospective Kurosawa (4) - Je ne regrette rien de ma jeunesse ( film 1946)

L'autre inédit de cette rétrospective (enfin, inédit au cinéma, celui-ci et la queue du tigre avaient été distribués directement en DVD)


 Et j'ai une fois de plus été surprise par l'aptitude du réalisateur à passer d'un genre à l'autre.
Nous avons donc pour l'instant un film noir inspiré d'Hamlet, un sujet historique tiré du théâtre japonais, un film de samouraï qui adapte Macbeth.
Retour au XX° siècle. Très exactement dans les années 30.
A Kyôto, un professeur de droit à l' université soupçonné de sympathies un peu trop à gauche pour le régime militariste ( on est en pleine guerre de Mandchourie, et le moins que l'on puisse dire, c'est que les relations entre la Chine et le Japon sont très tendues) est contraint à la démission. Très proche de ses élèves, avec lesquels il passe parfois des journées de détente en pleine campagne, il est soutenus par ceux-ci, dont Nôge Ryukichi.

La grève des étudiants est réprimée, Nôge envoyé en prison, mais Yukie, la fille du professeur, plutôt du genre insouciante et enfant gâtée, courtisée par les élèves de son père, n'a jamais oublié Nôge, le seul qui ne la brossait pas dans le sens du poil ni ne faisait ses quatre volontés.
a son exemple, elle décide de ruer dans les brancards d'une vie trop rangée, trop prévisible et lisse ( ses parents espèreraient la voir épouser le brillant Itokawa, futur procureur, que Yukie aime bien, mais trouve un peu ennuyeux), et décide sur un coup de tête , le genre dont elle est coutumière, de partir pour Tokyo avec en poche un diplôme d'anglais et de secrétariat, chercher un travail, et vivre SA vie, en faisant ses choix.

Son père approuve mais la prévient quand même que lorsqu'on fait des choix extrêmes, il faut être prêt à en assumer les conséquences. Or Yukie est exactement de ce genre puisque son leitmotiv , emprunté à Noge est " ne jamais rien regretter".
A Tôkyô, elle finit par retrouver Noge , apparemment rangé, mais qui cache des activités secrètes antimilitaristes, et l'épouse. Lorsque son mari est arrêté et meurt en prison, sur un nouveau coup de tête, la voilà partie pour rencontrer ses beaux-parents, dont elle découvre la rude vie de paysan.. quelle ne tarde pas à adopter.

Un film étonnant donc, où cette fois, l'action est centrée sur une femme, son énergie incroyable, et qui à mi chemin évolue vers le film social à tendance néoréaliste, lorsqu'il se concentre sur le quotidien des paysans, les deux pieds dans la boue à repiquer du riz du matin au soir. L'élégante qui jouait du piano au début de film se mue en paysanne aux mains abîmées par le travail des champs, mais qu'importe, ce n'est pas un mode de vie qu'on lui a imposé, et malgré sa difficulté, c'est un pas vers sa liberté...

J'ai beaucoup, mais alors beaucoup aimé ce nouveau pan plus politique de la filmographie de Kurosawa, d'autant que je ne m'y attendait absolument pas au vu des quelques images de partie de campagne bucolique qui l'ouvrent. La guerre y passe au second plan ( seulement évoquée par les activités cachées de Nôge et les accusations de haute-trahison dont fait l'objet celui que sa jeunesse un peu trop rouge et ses prises de position pacifistes avait déjà rendu un peu trop indésirable aux yeux du gouvernement militaire) pour se concentrer dans le dernier tiers sur la vie du petit peuple, et surtout pour une fois, le personnage central est une femme, forte et déterminée à suivre son chemin, peu importe s'il est plein d'ornières. Je ne peux qu'approuver cete évolution d'un personnage un peu tête à claques d'ingénue classique au départ qui se mue peu à peu en militante féministe ( les personnages qui travaillent le plus dur sont d'ailleurs les femmes)

L'actrice Hara Setsuko est excellente, et je viens de voir qu'elle est morte l'an dernier à 95 ans, après avoir arrêté brutalement sa carrière dès 1962, par choix personnel.

dimanche 17 avril 2016

Rétrospective Kurosawa (3) - le château de l'araignée ( film 1957)

3° film de la série. en théorie ça aurait du être les Bas-Fonds, mais hélas , j'étais malade le SEUL jour où mon planning m'aurait permis de le voir ( et sur la prochaine programmation, ça va être coton pour en voir certains qui ne sont diffusé qu'à des horaires où je ne suis pas libre. Je sais déjà que je raterai Dodeskaden)

Donc j'enchaîne un jidai Geki très théâtral avec un jidai Geki.. très théâtral aussi. Mais cette fois pas de transposition d'une pièce de Kabuki et d'un événement de l'histoire japonaise.

Entrons dans le vif du sujet: Dans le Japon médiéval, le château de l'araignée est une place forte entourée de quatre forts avancés. La guerre civile menace le château, deux des forts sont déjà tombés mais contre toute attente , la situation se renverse: Washizu, commandant du premier fort, et Miki commandant du second ont non seulement résisté mais reconquis le terrain perdu et gagné la bataille.

Convoqués par leur seigneur pour être récompensés comme ils se doit, ils se perdent dans une forêt brumeuse.. aussi brumeuse que la lande d'Ecosse en fait ( vous comprendrez cette comparaison en temps voulu). Chemin faisant ils rencontre un esprit à l'apparence d'ermite filant qui leur prédit un avenir glorieux:
Washizu sera promu et deviendra à terme seigneur du château de l'araignée, Miki sera promu commandant du premier fort et son fils deviendra à son tour seigneur du château de l'araignée.

Comment deux personnes peuvent être seigneur d'un même lieu, lorsque celui ci est déjà dirigé par une tierce personne.

Devant cet oracle brumeux, Washizu se serait contenté de sa promotion.. s'il n'avait eu le malheur d'en parler à sa femme, qui insinue peu à peu dans son esprit que leur seigneur ne lui a pas du tout fait un cadeau, qu'il a juste l'intention de l'éloigner, et à terme de s'en débarrasser, et donc que le seul moyen de réaliser la prophétie, c'est de le tuer avant qu'il ne le fasse, en enivrant les gardes, puis en faisant passer le meurtre sur le dos d'un espion à la solde de l'ennemi vaincu.
Et ainsi passer pour un héroïque vengeur qui vient non pour devenir seigneur , mais bien pour punir le lâche traître qui l'a fait assassiner, ce qui bien évidemment, ne peu se faire qu'en prenant le pouvoir.
Une fois gagné le titre de seigneur, il ne lui restera plus qu'à se débarrasser aussi de Miki et sa famille pour couper court à la prophétie..

Une forêt, de la brume, du fantastique? Une femme qui pousse son mari au meurtre du seigneur local pour prendre sa place,
Ça me rappelle quelque chose...
Bingo!

Il s'agit donc bien évidemment d'une transposition dans le Japon ancien de la tragédie de Shakespeare ( d'où la remarque sur les brumes écossaises), montrant que cette histoire d'appât du pouvoir et de manipulation est intemporelle et valable quel que soi le lieu.
Disons même que c'est même quasiment l'histoire intemporelle par essence: l'appât du gain ou du pouvoir l'ambition, la manipulation, la folie...
Et cette fois, contrairement aux Salauds ou la référence à Hamlet était plus vague, Kurosawa cite directement ses source: la femme de Washizu participe au crime, puis perdant peu à peu la raison à force de paranoïa, passe son temps à laver ses mains couverte d'un sang qu'elle seule voit au dessus d'une bassine.. vide...

On y retrouve dans le rôle principal Toshirô Mifune, j'ai déjà dit tous le bien que j'en pensais dans le premier sujet consacré à cette rétrospective, je ne reviendrais pas non plus sur ce que je disais: les cadrages superbes, l'éclairage qui joue à fond des contrastes en noir et blanc, le jeu volontairement très théâtral des acteurs, parfois presque expressionniste. C'est Macbeth de A à Z, dans une adaptation somptueuse.

Tiens ça me fait penser que je n'ai jamais vu la version d'Orson Welles tournée juste 8 ou 9 ans plus tôt. Je pourrais essayer de faire ça, une comparaison entre les deux pour l'occasion des 400 ans de la mort de Shakespeare, le 23 avril prochain...

samedi 9 avril 2016

Princesse Mononoke ( long métrage animation)

Devinez quoi? Pour mon anniversaire, mon nouveau cinéma favori m'a offert une double soirée:
Princesse Mononoke et Le voyage de Chihiro. Ouaip, les deux films pour le prix d'un ;) La classe ultime non?
Le hasard qui fait bien les choses, dans mon ancienne chambre ( la nouvelle n'est pas finie d'installer) j'avais 2 décors liés aux studios Ghibli: une mini affichette du voyage de Chihiro récupérée dans une magazine et un puzzle "princesse Mononoke" représentant San et son loup, ramené en souvenir de mon premier voyage au Japon.

Bon, ce n'est qu'une coïncidence qu'une telle programmation tombe pile le lendemain du jour en question, mais vous vous doutiez bien que pour célébrer l'événement, je n'allais pas louper l'occasion de me faire ce petit cadeau personnel. Et d'entraîner avec moi quelques membres de ma famille et potes.

Donc, Chihiro, je l'ai revu en janvier dernier en DVD, mais ça fait toujours plaisir de le revoir sur grand écran. Il y a des films dont on en se lasse pas. Bon j'aurais ben aimé avoir par exemple le château dans le ciel que, pour le coup, je n'ai jamais vu sur grand écran, mais, je sais de source sûre ( les gens du ciné, avec qui j'ai parlé l'été dernier lors de la programmation de Porco rosso) qu'à moyen terme, ils espèrent diffuser tous les longs métrages de Miyazaki. Pour Takahata, je ne sais pas par contre.

Cependant, je ne vais pas  re chroniquer Chihiro, le sujet correspondant est là. 


Princesse Mononoke, je ne l'avais jamais revu depuis sa sortie en fait, mais si les détails m'avaient échappés, je me souvenais bien dans les grandes lignes du héros et se sa malédiction, de San la fille des bois et ses loups, et de dame Eboshi. Et surtout des sylvains (kodama en vo), ces petites créatures aux allures de minis fantômes étonnés.
...et qui font un bruit de grelot en secouant la tête. Comment ne pas les trouver sympathiques?

Mais comme je n'avais pas trop creusé le sujet " légendes japonaises" à cette époque, beaucoup de choses m'avaient échappées et ce n'était pas de trop de le revoir.
On y retrouve non seulement les légendes ( des animaux géants, des dieux plus ou moins néfastes, la forêt et ses mystères..) mais aussi le côté écologiste cher à Myazaki sensei.
Le sanglier qui blesse Ashitaka au début du film est un animal géant, qui vivait en paix dans une forêt mythique, jusqu'à ce qu'ils se transforme en dieu maléfique après avoir été chassé et blessé par les humains. La seule solution pour essayer de se débarrasser de la malédiction, d'après la chamane du clan d'Ashitaka est d'aller trouver le mythique Dieu Cerf, qui seul pourra agir en sa faveur.. enfin, s'il le veut bien. Ce qu'Ashitaka va découvrir est une situation bien compliquée: les humains du coin veulent en fait prendre possession de la forêt pour y exploiter des mines de fer, rendant fous de rage les esprits qui l'habitent.. et provoquant par retour leur propre destruction.

J'avais oublié à quel point ce film pouvait être philosophique: le dieu cerf est à la fois le dieu créateur et destructeur, la vie et la mort, le jour et la nuit... C'est une vraie guerre qui s'y livre entre nature et culture.

Car dans le fond il n'y a pas de bon ni de mauvais dans cette histoire qui n'est absolument pas manichéenne. Dame Eboshi est à ce titre un personnage très intéressant, une femme forte comme on en trouve souvent chez Miyazaki: en tant que maîtresse des forges, elle fait détruire la forêt pour exploiter les mines et en chasse sans état d'âme les habitants, ce qui a priori la classerai du côté des êtres néfastes, comme le pense Ashitaka lorsqu'il la rencontre.

Oui mais.. Elle use de sa position sociale pour améliorer le quotidien de ses semblables, qui auraient probablement mené une vie miséreuse sans son soutien: anciennes prostituées ou femmes vendues par leur familles pour le devenir, malades.. à qui elle a appris à se défendre afin qu'il puissent résister aux attaques des samouraïs du secteur, toujours plus nombreux, qui convoitent les forges...
Pour elle comme pour les gens qui y vivent, les forges sont un lieu de travail, de travail difficile mais honnête et respectueux avec des employés nourris, logés, soignés. Pour les assaillants, les forges ne sont qu'une source de revenu facile dont il sera facile d'exploiter les ouvriers.
Or pour garder son indépendance, il faut produire de quoi subsister et aller le vendre, donc, forger du fer et fabriquer des armes, pour forger du fer, il faut du charbon, pour avoir du charbon., il faut exploiter la forêt, et en exploitant la forêt à outrance, on finit par provoquer un désastre écologique. Même avec de bonnes intentions au départ.

Bien difficile dans ce cas de trancher entre le bien et le mal...
Ca c'est dédié à tout ceux qui pensent que " se battre comme une fille " est quelque chose de négatif.

Personnellement je trouve Eboshi bien plus intéressante que San, la sauvageonne élevée par les loups. Tatata, je vous entends râler d'ici là, alors je m'explique.

En fait ce genre de personnage me pose toujours un problème, qui était déjà le même avec Mowgli dans le Livre de la jungle: je n'arrive pas à faire abstraction de quelques choses qui me chiffonnent: comment Mowgli a-t-il  inventé la coupe au bol et le slip? Sérieusement, il devrait avoir la tignasse du de Capitaine caverne et ne pas être préoccupé de se promener à poil au milieu de bêtes.. ben.. à poils aussi
Abandonnée dans la forêt alors qu'elle n'était qu'une toute petite fille, San a appris à parler ( là encore je veux bien, ce ne sont pas de "simples" animaux mais des dieux et des esprits dont pourquoi pas), se considère comme une louve à part entière et est considéré comme sa fille par Moro la louve, mais comme une humaine par les autres autres animaux ..

Question? C'est la louve qui lui a appris à coudre? Parce que non seulement elle porte une robe pas très pratique pour la chevauchée à dos de loup ou la baston ( alors que  logiquement elle devrait ne pas se soucier de trucs comme " fille = jupe, garçon = pantalons"), mais répare parfaitement l'accroc à la chemise d'Ashitaka. Je rappelle à toute fin utile qu'elle a été abandonnée dans sa prime enfance, probablement même avant ses 2 ans. Et pourtant, elle sait instinctivement ce que sont des boucles d'oreilles et un collier? Et sait coudre?
sisi, regardez, on voit parfaitement la réparation faite sur le pan gauche de son vêtement. D'ailleurs au delà du problème posé par le fait qu'une sauvageonne sache coudre, j'avoue que j'apprécie que ce détail de réparation ait été gardé par la suite. Dans combien de films, pas forcément animés, on voit ce genre de faux- raccord? Non, la réparation y est et y restera jusqu'à la fin.

Alors oui, je sais, je pinaille, mais j'ai vraiment du mal avec ces personnages sauvages qui s'avèrent maîtriser parfaitement les codes de la civilisation. Alors même que San la fuit, refuse son identité humaine ( ses doutes à ce sujet sont d'ailleurs un des thèmes du film). enfin, au moins la fin évite de la faire sombrer dans la guimauve donc déjà c'est un bon point. Je n'ai pas dit que je n'aimais pas le personnage, juste que je la trouve un peut moins intéressante qu'Eboshi, et que du coup, bah, les invraisemblances à son sujet me crèvent un peu les yeux.
Et puis au final,  les deux femmes se ressemblent au niveau caractère, Eboshi a juste su canaliser une violence que San n'a pas encore appris a maîtriser, mais les deux sont des battantes qui tiennent à leurs idéaux, pas forcément opposés d'ailleurs. Il suffiraient d'ailleurs d'un rien pour qu'elles trouvent un terrain d'entente mais ni l'une ni l'autre ne semble y être disposée.
J'ai l'impression qu'elles sont juste deux facettes de la même émotion: la volonté de liberté et d'indépendance, mais aussi la colère: canalisée qui mène à l'action organisée du côté d'Eboshi, la colère brute du côté de San qui met du temps à comprendre qu'on est plus fort à plusieurs que seule et fonce dans le tas tête baissée.

D'ailleurs même si le titre du film l'évoque directement, ce n'est pas paradoxalement le personnage principal, parce que la bonne, la très bonne idée du scénario c'est de donner la parole, à tous les sens du terme, aux esprits de la forêt ( ce qui donnes des dialogues assez savoureux lorsqu'un sanglier gigantesque se plaint qu'avec le rétrécissement de la forêt, sa harde - composée de sangliers presque aussi gros que lui- soit devenue faible, et ses guerriers sangliers ridiculement petits )
ouaip, ils sont devenus tout petits, vraiment minuscules.

Mais sinon, c'est un anime que je pourrais bien revoir encore à l'occasion, tant il y a de détails, de niveaux de lecture...et là encore je me sens frustrée de manquer probablement un tas de références. Enfin, je pourrais en parler encore pendant des lignes et des lignes, sur l'improbable amitié entre Ashitaka et Yakkuru son euh.. antilope? ( j'avoue je ne sais pas trop de quelle bestiole il s'agit) qui lui sert de cheval mais lui est attaché comme un animal de compagnie aussi fidèle qu'un chien, sur le bonze errant qui est l'inverse d'Eboshi: sympathique au premier abord, mais chargé d'une mission très douteuse et fortement intéressé par l'or.

Ho, et puis, se déplacer à dos de loup géant c'est quand même la classe. Bon pas autant que voler à dos de dragon ( et d'ailleurs la programmation de Chihiro tout de suite après fait ressentir une grosse parenté graphique entre les loup et le dragon, ils ont comme un air de famille)
Du coup, même si j'aime énormément Princesse Mononoke, je garde quand même une préférence pour Le voyage de Chihiro
En tout cas j'espère que ce tout jeune cinéma nous proposera encore ce genre de soirées de grand luxe, à prix abordable: 10 €  la soirée, ça n'est pas excessif!

D'ailleurs j'y ai croisé plusieurs des assistantes de mes cours de japonais, l'une d'elle m'avait dit qu'à 8 ou 9 € le film, le cinéma en France était "bon marché", alors que je trouve ça très cher par rapport à quelques années en arrière.  Renseignement pris, une séance de cinéma à Tokyo fait facilement 1800 Yen donc, selon les cours du moment, entre 15 et 18 €! Du coup, ça ne m'étonne pas qu'elles aient profité de l'aubaine pour aller les voir en vo sur grand écran pour si peu cher.

vendredi 1 avril 2016

Bôei bu love! (série d'animation)

Salut les amis, vous avez vu la date?

Comment passer à côté du jour du poisson sans faire un billet un peu décalé. Parce que la chose en question est tellement improbable que je voulais en parler ( puis c'est thématique, il y a un poisson rouge comme personnage dans la série dont je vais parler..)

Tout a commencé un jour sur la page facebook "franponais" (faudra aussi que je fasse un sujet sur mes trouvailles à ce sujet), la page dédie à l'emploi délirant  du français au Japon dans n'importe quelle situation, parce que ça fait classe.
 Pas seulement pour les marques françaises ou les restaurants français mais pour n'importe quoi. On en trouve parfois dans les dessins animés, et donc un jour je tombe sur ça...

Quelqu'un a partagé cette pépite : oui le pseudo de guerre de ce personnage est " battle lover épinard". En français dans le texte. Pas horenso, mais bien "epinaruu".
 Ne me demandez pas pourquoi il est question d'épinards avec un dessin de trèfle, même après avoir vu la série, je n'ai toujours pas trouvé l'ombre d'une explication rationnelle.

Pour ceux qui me connaissent, comment aurais-je pu résister? Après un moment d'hésitation entre hallucination, consternation et crise de rire, il a fallu que j'aille voir de quoi il s'agissait.

Je disais là, qu'il m'arrive parfois de tester des trucs très improbables, pour le fun.

Des fois on se dit qu'une série à l'air potable et ça s'avère nul, et d'autre on se prépare mentalement à quelque chose de nul et en fait on passe un bon moment...
oui, c'est rose, mais non, ne partez pas de suite, je vais vous expliquer pourquoi cet anime est fun..
Et c'est ce qui est arrivé avec cette série là, parce qu'en fait.. ouais, je me suis vraiment amusée. Faut dire qu'en sortant de la nullité vampirique de l'hiver dernier, j'avais plutôt envie de choses colorées et festives et surtout qui ne se prennent pas au sérieux, et c'est le cas. Bon point numéro un, c'est portenawak, mais volontairement!
(là je suis en train de me dire que je dois être une des rares personnes sur le web francophone à proposer un avis développé sur cette série de l'an dernier, mais ça n'est parce que c'est volontairement barré qu'il faut passer sous silence. Bien au contraire.)

Bôei bu love est en fait une parodie des séries de magical girls qu'on a tous et toutes plus ou moins croisées au moins une fois dans notre vie de téléspectateurs. Pour ma génération c'était Gigi, Creamy, Vanessa, Emi.. ont suivi quelques années après Sailor Moon, Sakura Card Captor... Et ça continue.

une parodie? Même Gigi et ses bestioles n'en reviennent pas.
 Toujours le même scénario plus ou moins: une gamine (ou parfois plusieurs) qui reçoit une super pouvoir, peut se transformer soit en adulte, soit juste changer de fringues, grâce à l'intervention d'une bestiole bizarre qui lui confie une mission du genre sauver la terre. Et le tout avec un déguisement souventtellement raté qu'on se demande toujours comment personne fait pour ne pas la reconnaître.

Avant..

Après..

Bah, oui, c'est impossible, voyons, elle a un collier, des boucles d'oreilles, une couronne, un noeud d'une autre couleur autour du cou et des barrettes rouges. Puis Tokyo regorge de blondes avec ce qui ressemble à deux pelotes de laine sur les couettes. Ca serait vraiment le hasard que quelqu'un perce son déguisement à jour...
Tandis que dans le cas de Gigi ( oui, la gamine à cheveux roses, juste en haut), ben..il y avait quand même une bonne raison de ne pas la reconnaître:
oui, c'est la même après transformation, et non,  ce n'est pas une OAV "Gigi fait le trottoir magique"
Quand j'avais 8 ou 10 ans, dans ma classe, pas mal de garçons regardaient Gigi, vous savez maintenant pourquoi. Ca, et pour la demie-seconde à chaque épisode où on la voyait cul nu.

Et c'était parti pour une enfilade d'épisodes avec toujours strictement le même scénario, prenons justement Sailor Moon, puisque c'est celle qui est visée en particulier par cette parodie.

Nota: j'ai regardé la chose en VOST, donc je ne sais pas ce que ça donnait en français hormis le coup du "frisbee lunaire" sur lequel j'étais tombée un jour par hasard. Ha, oui, je serais un monstre, j'aurais la trouille de me faire attaquer à coup de frisbee par une petite blonde prénommée " lapin de la lune"

Structure d'un épisode au hasard:

>Usagi dans sa vie quotidienne ( qui consiste à s'agiter sans trêve et à pleurnicher pour rien, et souvent à se friter avec la colérique Rei)
> pendant ce temps chez Queen Beryl et .. machin, je ne sais plus le nom de son sbire abruti, on complote pour voler l'énergie des humains
>un monstre ou un méchant attaque la terre pile toujours dans le même quartier, les monstres n'ont jamais pensé a attaquer dans le patelin d'à côté
> transformation pleine de paillettes et de couleurs flashy
> Je vais te punir blablabla
> noms d'attaques complètement bizarres ( sailor Mercury et son attaque " savon spray"!  )
> méchant vaincu!
> Queen Beryl enrage, traite son laquais de bon à rien, mais ne le carbonise pas sur place, on recommencera avec le même nase la prochaine fois
> retour au quotidien d'Usagi.

(oui je n'avais pas suivi du tout cette série à sa première diffusion, il a fallu que j'aille en voir quelques épisodes pour pouvoir saisir le sel de la parodie. Juste quelques épisodes, parce que ça tourne assez vite en rond et que j'ai du craquer au bout de pas beaucoup: héroïne crispante, ennemis couillons, reine qui n'en fout pas une, je ne peux pas encadrer le prétentieux masqué.. bien plus drôle dans son identité quotidienne que le public aura cerné ès sa première apparition. Si, j'aime bien  Mercury - la geekette - et Mars - la râleuse, mais c'est tout ou presque)

Donc ça a du énerver quelques scénaristes qui ont décidé de parodier ça avec disons, un angle d'attaque inédit: on transpose, mais au lieu d'une bande de filles, ça sera un groupe de garçons.
D'accord, une bande de gars qui vont devoir sauver la planète, on connait, mais au lieu d'avoir un anime qui reprend les codes des séries de super héros, on reprend les codes des séries de magical girls...

Avec les tenues ridicules, le petit animal mignon / casse-pieds qui confie une mission énorme à des gens un peu à la ramasse, le méchant qui veut dominer la terre ( et s'est brouillé avec un des gentils pour un malentendu arrivé en CP ) les personnages cliché, les transformations disons hautes en couleurs.. Oui et même la raison pour laquelle personne ne reconnait personne est évoquée pour une fois ( une raison WTF, certes,  mais il y en a une!)

Et l'incongruité de la situation fait vraiment ressortir le ridicule des poncifs, sur lesquels on passait, peut-être parce qu'on avait l'habitude, lorsqu'il s'agissait de nanas.

Autre bon point: pour une fois les personnages se posent des questions: Pourquoi on devrait obéir à une bestiole rose? Pourquoi on a des tenues ridicules? Il va falloir recommencer? C'était tellement pathétique, pourquoi on doit dire des formules aussi gênantes?
yep, va falloir aller péter leurs tronches aux monstres dans CES tenues. Et non, ce n'est pas optionnel, ça fait partie intégrante du lot..

Et, plus tard, prennent la chose sinon avec philosophie, du moins avec résignation: "bon, on a qu'à considérer ça comme du cosplay. De toute façon , il va falloir y aller sinon l'autre machin rose ne nous lâchera pas, donc plus vite on y va, plus vite on aura fini."  Vraiment Super héroïques!

Ca commence donc bien normalement, enfin, pour un anime: Deux lycéens pas très motivés sont en train de traîner dans l'onsen du quartier en discutant de tout et de rien, et surtout de bouffe et des mérites du chikuwabu (une sorte de grosse nouille cylindrique sans goût particulier qu'on trouve dans l'Oden, j'aurais au moins appris ça) quand ils sont littéralement assaillis par une créature rose aux allures de wombat.

La bestiole ne leur lâche pas les baskets et revient dès le lendemain leur demander à eux et leurs copains, de former un groupe de sauveurs de la terre "au nom de l'amour"

Donc à ma droite, l'équipe des gentils, coachés à leurs corps défendant par le wombat rose aux allures de bisounours, un extraterrestre qui ne ressemble que par une heureux hasard à une créature terrestre
- En, grand dadais apathique, dont le but ultime est de buller à vie.
- Atsushi, meilleur pote d'En (  ayons une minute de silence pour pauvre malchanceux qui va être surnommé "epinard" pendant 12 épisode), le binoclard, pour une fois, pas vraiment un génie, juste le type dans la moyenne.
- Ryû, le dragueur qui trouve son compte en imaginant qu'il s'agit de cosplay et que ça va lui faire gagner des points auprès des filles. Pas de chance, il n'y en a pas UNE dans cet anime!
- Io, le type à la coupe au bol, obsédé par l'argent dont la phrase type est " qu'est-ce que j'ai à y gagner?"
- Yumoto, le gosse surexcité qui pourrait vite se faire coffrer pour harcèlement animalier tant son obsession, à la limite du drogué en manque, est de papouiller le wombat.
oui les gars, va falloir aller sauver le monde habillés comme ça. Pas sure que le monde soit vraiment rassuré en fait...

A ma gauche, le trio de bad guys

- Kinshiro, le ronchon intransigeant à coupe au bol qui fait toujours la gueule
- Gero, créature narcissique à cheveux roses qui pourrait bien être la soeur jumelle cachée d'Utena ( j'ai des références qui datent!)
- Arima, le type qui probablement rejoint le groupe des méchants parce qu'il a vu de la lumière et qu'il est entré, et que justement il y avait besoin d'un troisième, je ne vois que ça...
non, désolée de vous dire ça, mais la jolie fille à gauche n'en est pas une. Je sais, je sais...moi aussi j'ai cru au début qu'il y avait au moins UNE nana dans cette histoire, mais... non! Snif.

Coachés par Maître Zunda, le méchant le moins charismatique mais le plus chou de l'univers:
oui c'est un hérisson vert venu d'une autre planète et bien décidé à manipuler les humains pour semer la discorde. En mangeant des escargots, en bon hérisson qu'il est.

Ah oui, il nous reste à évoquer les monstres: le monstre en baguettes jetables, l'homme poulpe, l'homme boulon, la table chauffante géante, le samourai melon.. ( dont les noms sont des jeux de mots, je suis hyper contente de l'avoir remarqué à plusieurs reprises, ça veut dire que je progresse en langues. Genre l'ambitieux à en crever qui s'appelle " Itsumo Ichiban", textuellement " toujours le premier")


ceci est un monstre. Craignez le terrible monstre chikuwabu, et sa non moins terrible attaque "bouillon de légumes"!
Que pourrais-je rajouter pour vous convaincre que cet anime sous des dehors débiles est en fait authentiquement débile, mais dans le bon sens du terme?
Qu'il y a  un prof mort mais pas tout a fait, dont le "cadavre" est une source de gags?
Que le poisson rouge connaît les règles du théâtre Kabuki sur le bout des nageoires?
Qu'il y a aussi une parodie de Goldorak assez fendarde et des références à Shining dans le dernier épisode?
Qu'il n'y en a que 12, et donc que ça se voit assez rapidement, sans user jusqu' à la corde son propos délirant?
Qu'il y a des sous-entendus absolument de partout? ( et ce n'est pas moi qui me fait des idées, la traduction française est bien ficelée, ou en tout cas je ne sais pas si elle rajoute des sous-entendus qui n'y étaient pas en japonais.. mais j'en doute, vu que l'équipe de prod a aussi bossé sur Gintama, parodie de SF ou les sous-entendus étaient aussi légion...)

c'est juste des baguettes magiques les gars, pas des accessoires SM..même si du point de vue des monstres à qui vous allez devoir matraquer la tronche, ça pourrait y ressembler.

Je laisse aux anglophones le plaisir de déchiffrer le double sens du nom du monstre boulon ( car en français, manque de chance, il ne passe pas, on a juste des jeux de mots sur le thème " péter un boulon")
Donc, si vous voulez tenter le coup, et je vous le conseille,avec juste dans l'idée de se détendre en se payant gentiment la fiole des magical girls et des super sentai, mais il vaut mieux avoir un esprit un peu tordu, ça rend les choses plus drôles..

Intégralité ( 12 épisodes) visible ici en vost français, gratuitement en streaming et 100% légal, que demande le bon peuple?

Promis, le prochain sujet animation sera moins rose et pailleté!

Enfin, juste pour le fun,une Magical girl que je ne connaissais absolument pas. Je viens de manquer m'étouffer de rire. Autant parce que je ne suis pas passée loin d'être une petite fille blonde et gentille, à une lettre près, que pour la représentation kitschouille de l'Europe ( avec une tour Eiffel minuscule bizarrement coincée entre des bâtiments, elle a dû être téléportée dans la cour du Palais Royal ou sur la place Vendôme...)