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jeudi 29 janvier 2015

Une parfaite chambre de malade - Ogawa Yôko

Voilà un auteur que je n'avais pas encore eu l'occasion d'aborder, mais j'avais déjà croisé ce nom à plusieurs reprises dans le cadre du challenge In the mood for Japan" il y a quelques années. Je l'avais mis dans un coin de ma tête, et l'occasion s'est présenté sous forme d'un pillage en règle du rayon littérature japonaise de ma médiathèque.
J'ai pris ce titre un peu au hasard parmi plusieurs, et il s'avère justement que les deux nouvelles de ce recueil sont ses premiers écrits ( 1989), pour une fois je commence involontairement ma découverte dans le bon ordre.

Un parfaite chambre de malade  - Une narratrice anonyme annonce d'emblée la couleur: elle va nous parler des derniers mois de la vie de son frère, mort d'un cancer à 21 ans ( la maladie exacte n'est pas nommée, mais on le devient assez bien). Lors de ces derniers moments à passer ensemble, le frère et la soeur qui étaient assez distants jusque là se rapprochent. Comme elle travaille comme secrétaire à l'hôpital où son frère est soigné, dès la fin de son service elle vient lui rendre visite et passe peu a peu presque tout son temps libre auprès de lui. Où plutôt dans la chambre, un endroit qui la rassure: propre, net, sans la moindre tâche. Car cette femme est hantée par le souvenir de sa mère, malade mentale à tendance " diogène" qui entassait chez elle une pagaille invraisemblable et laissait constamment moisir de la nourriture dans les endroits les plus improbables. La narratrice en a développé une répulsion physique pour la saleté, et par extension pour la nourriture, qu'elle assimile à la corruption, à la saleté , aux ordures, partant du principe que " ce qu'on n'a pas mangé moisit, donc, puisque qu'on mange des choses putrescibles, qui dit qu'elles ne moisissent pas à l'intérieur du tube digestif, corrompant ainsi l'organisme". Elle fait une fixation sur les bouches des gens ne voit plus que ça, le côté organique de la corvée de manger, la couleur d'une sauce qui lui rappelle le jour où elle a assisté a une ablation chirurgicale. Oui, elle est passablement dérangée elle aussi.
 En ce sens, la chambre de malade débarrassée tous les jours de la moindre miette est parfaite. Son frère aussi est parfait, lui qui de par sa maladie n'arrive plus a manger et s'affaiblit de jour en jour et semble non pas mourir mais devenir transparent et s'effacer proprement. La rencontre avec le médecin soignant, qui lui aussi a eu une jeunesse hors du commun, va lui permettre enfin d'extérioriser son angoisse de la vie et de la mort , qu'elle fuit en se réfugiant dans un endroit perçu comme immuable, où ni la vie ni la mort paradoxalement n'existent.
Ce texte assez court est très riche en thématiques, au delà de sa curieuse fixation sur la pourriture et l'organique jusqu'à en donner la nausée. J'ai au final bien apprécié.

La désagrégation du papillon - là encore il est question de maladie, d'enfance plutôt étrange et d'une narratrice mal dans sa vie. Une jeune femme qui a été élevée par sa grand-mère assez stricte, vient de la confier à une institution spécialisée car la vieille dame souffre de maladie d'Alzheimer et n'est plus autonome. Mais cette séparation, bien que nécessaire puisque la famille n'est plus en mesure de s'occuper d'elle , est vécue par la narratrice comme un déchirement, voire une trahison. En effet, elle estime, piété filiale oblige, qu'elle aurait du se dévouer entièrement à celle qui l'a élevée (sa mère l'a quasiment abandonnée là) et tente de compenser l'absence de Sae, la vieille dame, en s'imaginant.. enceinte. Peut-être l'est-elle , peut-être pas, rien n'est sur, mais toujours est-il qu'elle préfère assimiler la boule d'angoisse et de culpabilité qu'elle a au ventre de cette manière.

Etonnamment, bien que ces deux nouvelles soient proches par les thèmes abordés ( la maladie, la mort, l'absence d'un être cher, l'enfance inhabituelle), mais j'ai moins bien accroché à la deuxième que j'ai trouvé moins aboutie. Elle part un peu dans tous les sens, si bien que même si je l'ai lue il y a seulement quelques jours, j'ai un souvenir moins clair que de la précédente. Des péripéties, ou plutôt, des non-péripéties quotidiennes qui s'enchaînent un peu moins bien, avec une rupture qui s'annonce entre la narratrice et son petit ami, en compagnie de qui elle ne se sent pas vraiment bien, des non-dits un peu usants qui ne font pas vraiment progresser le récit mais le font bifurquer vers quelque chose d'autre de manière moins convaincante ... voilà, C'est au niveau narratif que j'ai moins accroché, et c'est peut être ce qui importe le plus pour moi.
écrivain contemporain

jeudi 15 janvier 2015

l'oeil du serpent, recueil de contes - Shinoda Chiwaki

Première lecture nippone de l'année!

Voici donc "l'oeil du serpent", un recueil de contes édité chez Folio 2€ qui est en fait un condensé d'un ouvrage plus gros " de serpents galants et d'autres, contes folkloriques japonais" publié chez connaissance de l'orient.
Comme son titre l'indique, la thématique principale sera le serpent, dans son versant folklorique.
3 parties dans ce petit livres
- les femmes serpents (7 contes)
- les hommes serpents ( 7 contes)
- belles et monstres (7 contes sur la métamorphose, avec un homme araignée, un blaireau à forme humaine, des pierres qui se changent en loups, et encore quelques serpents..)

Car le serpent folklorique japonais est doté d'une particularité: ils -ou elles-  n'aiment rien tant que prendre forme humaine et se mêler aux humains qu'ils trompent facilement grâce à leur apparence. car les serpents et serpentes sont particulièrement séduisants et liés à l'élément eau. Ils peuvent faire pleuvoir sur une rizière asséché, ou au contraire boucher un puits, et réclamer un cadeau en échange de leurs services ou du fait de stopper leurs méfaits. En général le fils ou la fille de la famille.
Du coup le recueil regorge d'histoires où des cousines de Mélusine séduisent de naïfs humains, charmés par ces trop jolies filles, mais comme dans leur versant européen, malheur à quiconque verra leur vraie apparence. Mais si les serpentes utilisent surtout leur charme, les serpents utilisent en premier lieu leur pouvoir sur l'eau pour passer des "contrats" avec les humains.
Ca ne se passe pas toujours mal, remarquez, dans le conte de "la mare à Oyoshi", l'humaine et le gentil serpent semblent faits l'un pour l'autre. Mais fréquenter un serpent est quasiment toujours l'assurance de perdre à son tour son identité humaine. Sauf dans "l'oeil du serpent" où c'est la serpente inoffensive aux allures de fée qui est la première victime des circonstances.
Je suppose que dans beaucoup de cas, il s'agissait comme souvent dans les contes d'expliquer l'appellation de tel ou tel lieu dit, ou d'inspirer la méfiance instinctive des cours d'eau et marais où il est facile de se noyer ou de se perdre.

Zut, moi qui espérais une vision un peu moins négative de celle judéo-chrétienne, le serpent est parfois assimilé à l'image de l'ogre qui dévore les humains. Pas toujours heureusement.

J'ai bien aimé aussi les quelques autres contes, celui sur le blaireau changé en humain qui berne une coiffeuse et l'enlève - la femme a un sens de la répartie assez réjouissant- ou celle très originale des pierres-loups.
Un lecture très courte et à conseiller, je vais maintenant chercher le recueil complet, j'adore ces thèmes folkloriques.


Akemashite omedetô!

Une bonne année à tous, avec pas mal de retard, j'avoue qu'étant pas mal malade depuis une dizaine de jours, je n'ai pas trop eu le courage de mettre les blogs à jour.
point culture? point culture!

J'ai donc appris l'an dernier en cours de langue qu'il y a deux façons de dire "bonne année" en japonais:
Yoi o toshi wo...: avant le 31 décembre, l'équivalent de notre " bonne fin d'année"
et
akemashite omedetô (gozaimasu): à partir du premier janvier.
comme chez nous, il n'est pas de mise de dire "bonne année" avant le début officiel de l'année.
Comme chez nous, on s'envoie des cartes de voeux, mais le but du jeu est qu'elles arrivent pile le 1° janvier, la Poste japonaise fait tout pour que ce soit le cas.. à condition que les gens pensent à les poster quelques jours avant quand même.
Et pou le nouvel an, on mange du mochi, des petits gâteaux un peu élastiques à base de farine de riz. Et chaque année, il y a des accidents, quelques personnes s'étouffent avec, surtout des personnes âgées ou des enfants qui ont essayé de les gober d'un coup.

D'autres traditions du nouvel an japonais ici