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lundi 23 mars 2015

Dur, dur - Yoshimoto Banana

Encore un auteur dont j'ai vu le nom ici et là sur les blogs ( et comment oublier un pseudo pareil, " Banana"?), une écrivaine contemporaine de la même génération que sa compatriote Ôgawa Yoko que j'ai découverte il y a peu. Et comme j'ai entrepris de dévaliser le rayon " histoires courtes" de la médiathèque, j'ai choisi un peu au hasard ce recueil de deux nouvelles , ou contes, dont le point commun premier est d'avoir le mot " dur" dans le titre. Les autres points communs étant un cadre temporel similaire ( l'automne, qui est presque un personnage à part entière) et la thématique du deuil.


Dans Peau dure ( hard- boiled, étonnamment, les titres originaux sont en en anglais, littéralement "dur" comme la cuisson des oeufs, de manière imagée " dure-à-cuire"), une narratrice anonyme en randonnée dans la montagne, est victime d'une série d'incidents fantastiques, à la limite du surnaturel: un caillou noir lié à un sanctuaire abandonné semble la suivre partout et attirer la malchance, l'hôtel qu'elle a choisi se révèle sinon glauque , du moins étrange, et l'ambiance générale lui fait faire des rêves dérangeants liés à son passé: Autrefois elle a eu une brève liaison avec Chizuru, une autre femme, un peu médium. Les deux femmes ont vécu ensemble dans un appartement à peine plus confortable qu'un squatt, avant de rompre sans heurts ni larmes de cette histoire sans avenir. Chizuru est morte accidentellement peu de temps après, et la narratrice ne s'était pas vraiment rendu compte que cette perte lui rongeait la vie, jusqu'à cet automne.

Dans Coup dur ( hard-luck) c'est une famille entière qui est victime d'un coup du sort: Kuni-chan, la fille aînée est mourante, dans le coma après une attaque cérébrale, probablement due à un excès de zèle au travail. La situation est difficile à vivre surtout pour sa soeur, la narratrice qui était très proche d'elle, qui a bien du mal a accepter l'inéluctable, tout en reconnaissant à mi-mots qu'il serait peut-être moins pénible que Kuni-chan meure vraiment, plutôt que cette non-présence qui n'est pas vraiment une absence. C'est Sakai, le frère de l'homme que sa soeur allait épouser, un type un peu original mais sensé, qui va l'aider à passer le cap au moment fatal.

J'ai beaucoup, mais alors vraiment beaucoup aimé ces deux nouvelles, plus encore qu'" une parfaite chambre de malade" sur un sujet similaire ( en tout cas similaire au deuxième texte). D'abord parce que les deux sont bien ancrés dans la réalité, mais avec une petite touche de fantastique bienvenue. Et un humour léger, qui se traduit en situations cocasses:  dans la deuxième nouvelle, l'héroïne revient en voiture avec son père après avoir accompli la tâche déprimante de vider le bureau de sa soeur.. mais le retour dans une voiture trop petite qui déborde de trop de cartons est à la fois un moment comique - l'humour aide à surmonter l'angoisse- mais aussi un rapprochement très mignon entre un père et sa fille qui subissent un même choc et luttent chacun à leur manière pour ne pas se laisser abattre. Dans la première nouvelle, c'est une narratrice plutôt réaliste qui se retrouve aux prises avec des fantômes...et pas seulement ses propres fantômes. Mais dans les deux cas, ce sont des femmes fortes, qui ne se laissent pas abattre par les circonstances, et ça, ça fait très plaisir à lire. Les thèmes sont lourds, mais le traitement est optimiste.
Encore un auteur que je vais suivre.


2 commentaires:

  1. Le côté fantastique semble permettre de donner un baume au coeur sur ces deuils. Merci du partage.

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    1. Exactement. depuis j'ai lu Kitchen du même auteur, et j'aime vraiment ses personnages et sa touche fantastique
      Dans la 3° nouvelle du Recueil Kitchen, c'est aussi un événement teinté de fantastique et de folklore asiatique - la légende du bouvier et de la tisseuse- qui permet à l'héroïne d'accepter sa dépression nerveuse pour s'en sortir. Donc les thèmes ne sont pas franchement joyeux, mais le récit est tout sauf déprimant. Et les personnages sont toujours un peu marginaux et paumés, ceux que la société japonaise préfère ne pas voir. C'est un thème qu'on retrouve souvent dans la littérature japonaise: le personnage à part, seul face à une société qui ne veut pas reconnaître sa différence: on peut être différent, mais il ne faut pas que ça se sache, le clou qui dépasse appelle le marteau ( authentique proverbe japonais)

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