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mercredi 17 octobre 2018

Black Paradox - Junji Ito

Semaine dédiée aux fantômes, monstres et autres créatures fantastiques japonaises. Peu de temps libre de mon côté cette année pour cause de reprise d'études, mais quand même, j'ai réussi à sauver l'honneur avec un manga pour le mercredi BD. Il va être question de suicidaires qui ouvrent une porte dimensionnelle sur l'autre monde. Miam!

Ito, je le connaissais simplement de nom en fait. Avec sa réputation de spécialiste de manga fantastique-horrifique.
Et c'est une découverte plutôt sympa, quelque chose qui est à la fois doté d'une personnalité graphique curieuse ( mi réaliste , mi caricaturale), et d'un fond exigeant, il ne se contente pas de faire de l'horreur pour l'horreur, ce n'est pas un bête slasher gratuit. Et ça, ça me plaît.


Tout commence par la rencontre IRL de 4 curieux personnages qui se sont connus sur le forum internet " black paradox suicide". Tous sont suicidaires, et ont donc convenu que le jour de leur rencontrer serait aussi celui où ils passeraient ensemble de vie à trépas.

Leurs raisons?
"Marseau" ( j'ai envie d'écrire Meursault, vu la crise existentielle qu'elle traverse) est douée d'un pouvoir de prémonition, mais trop imprécis pour avoir une vision claire de l'avenir, ce qui la conduit à un état permanent d'inquiétude imprécise qui évolue en angoisse insupportable. Elle se compare d'ailleurs elle même à Akutagawa.
"Tableau" est un homme dont on ne sait presque rien, si ce n'est qu'il croise régulièrement son sosie qui semble se moquer de lui. Persuadé que ces apparitions de son double maléfique est une annonce de sa mort prochaine, il a donc décidé de la devancer en la choisissant lui même.
" Pitan" travaille dans la robotique, et lui aussi est victime de son double: il a servi de modèle à un robot ultra perfectionné, qui est devenu la mascotte du labo. Lui est repoussé dans l'ombre est l'anonymat, dépossédé de son identité par ce double de lui-même .. mais en mieux.
"Baratchi" est une femme apparemment normale, et même jolie.. qui cache sans cesse la moitié de son visage, défiguré par une tâche de vin, qui lui a fait prendre son image en horreur.

Tous ont donc des raisons liées à leur identité de vouloir en finir, mais.. rien ne va se passer comme prévu.
Dès le premier chapitre, Marseau se rend compte que des choses clochent: Pitan cliquette, Baratchi ne semble pas savoir quel côté de son visage est atteint, et de plus, assise à l'arrière de la voiture, elle ne voit que sa propre image dans le rétroviseur. Chose encore plus étrange, ils sont doublés par la même voiture, où elle n'est pas assise, mais où se trouvent les 3 autres.
Elle a tout simplement pris place dans une autre voiture, dans un univers parallèle, où elle se trouve en compagnie, justement, des doubles que fuient les 3 autres.

Dès lors, les choses vont aller de plus en plus bizarrement. Ils ne se suicideront pas ce jour là, ni les suivants, mais vont carrément ouvrir involontairement une porte dimensionnelle entre le monde et... un autre univers? le monde des morts?
Duquel d'étranges pierres rondes, dotées de propriétés encore plus étranges se fraient un chemin dans notre univers.
Les avis divergent à ce sujet: Baratchi y voit des spectres, cristallisés, mais aussi et surtout, une rareté que le monde va vouloir s'arracher, car elles représentent une source d'énergie colossale et potentiellement destructrice, et le moyen de faire fortune - car avec de l'argent, elle pourra se faire opérer, et donc plus de raison de mourir. Tableau la suit dans cette entreprise, au contraire de Pitan ( hors jeu depuis longtemps, mais dont les envies suicidaires ont même contaminé son robot), et Marseau qui pressent la catastrophe qui va inévitablement se produire, lorsqu'on veut exploiter des choses d'un autre monde, sous prétexte d'"aider l'humanité" tout en commençant par s'enrichir personnellement.
Mais ce quatuor, y compris les deux plus cyniques,va attirer la convoitise de gens encore plus cyniques qu'eux, bien déterminés à exploiter cette source d'énergie pourtant dangereuse " pour le bien de l'humanité" au détriment de cette même humanité. Juste par appât du gain et du pouvoir.




Au delà du côté horrifique,il y a quelque chose d'intéressant Je ne sais pas si les sphères minérales-concrétions d'âmes- énergie infinie d'Ito sont une référence à l'uranium, mais en tout cas ça y ressemble. Il y quelque chose de très radioactif dans cette histoire. J'ai vérifié la date de publication: 2008, donc antérieur à la catastrophe de Fukushima, et pourtant, on peut difficilement ne pas y penser.

L'autre point intéressant est l'exploitation des "âmes", d'un point de vue quasiment philosophique ( sur une base simple, s'il s'agit d'âmes, en les ramenant dans notre monde et en les fragmentant pour en produire de l'énergie, on condamne les générations futures, puisqu'elles sont issue du " recyclage" des âmes, n'oublions pas qu'on est dans un pays de tradition bouddhiste, avec ce que ça suppose de réincarnations). Exploiter les"âmes", revient à exploiter les humains, sans pitié ni discernement.
Avec cette remarque hautement naïve de la cynique Baratchi, la première qui a voulu se faire de l'argent grâce à ça: " l'humanité n'est pas bête au point de continuer à les utiliser alors qu'elle sait qu'elle court à sa perte"...

Hahahahahahahaha.

Non, mais ça, c'est la SF-le fantastique que j'aime, qui l'air de rien, balance une vanne bien sentie sur le monde contemporain.

Avec en plus une petite touche qui me plaît bien: je ne sais pas si c'est voulu, mais Pitan - et son avatar robotique - m'évoque assez souvent "Cesare" du cabinet du Dr Caligari.
Dans la manière dont il est représenté, qui évoque pas mal la gestuelle et la tenue de l'acteur Conrad Veidt dans ce film ( ça ne serait pas absurde: l'un est un robot, Cesare l'hypnotisé a une gestuelle très peu humaine, et les deux portent des tenues très similaires). Et prendre Caligari comme référence, c'est pour moi le summum du bon goût cinéphile!

ok, donc, non, ce n'est pas du tout un hasard...
1920! Je kiffe ce film, je kiffe ce personnage ( sans qui il n'y aurait pas d'Edward Scissorhands, d'ailleurs)

Cette histoire est complétée par deux autres très courtes: " la femme langue", variation assez crade ( et un peu saphique) sur les légendes urbaines, et en particulier celle de la kuchisake onna, et le "pavillon étrange" ( 4 pages en couleurs) qui imagine une exposition en 2105, dont le clou est un cormoran, espèce disparue depuis longtemps - et qui n'a pas grand chose à voir avec les cormorans actuels.
Donc bon, si la femme langue est un récit, avec une intrigue, il n'a pas la teneur existentielle du précédent, et Le pavillon n'a pas vraiment d'intérêt.

Mais c'est une bonne première lecture de cet auteur, il y en aura d'autres.

mercredi 19 septembre 2018

All My Darling Daughters - Yoshinaga Fumi

Allez, savoir pourquoi, ça fait des années que ce titre que je n'avais jamais lu m'était resté en mémoire, il m'intriguait, sans pour autant m'inciter à l'achat.

Un passage à la bibliothèque, et il était là, c'est l'occasion où jamais.




Nous avons donc un josei, mettant  en scène des relations familiales complexes, sur plusieurs générations.
D'abord il y a Marie, la mère, et Yukiko, sa fille trentenaire, qui habitent ensemble. Elles s'adorent, mais communiquent peu, ou plutôt, communiquent énormément en se chamaillant sans cesse.


il est édité en français par Sakka, mais je n'ai pas trouvé d'illu' en français..


Yukiko est une fille assez peu sympathique au premier abord, dotée d'un visage " au regard mauvais" comme elle le dit elle-même, un peu souillon et assez flemmarde. Marie est un électron libre qui n'en fait qu'à sa tête, et ce d'autant qu'elle vient de se remettre d'un cancer. Ce qui a été le déclic ( ou plutôt l'excuse) pour proclamer " la vie est courte, à partir de maintenant, je fais ce que je veux".. à quoi Yukiko rétorque immédiatement, " c'est déjà ce que tu as toujours fait".
Et donc Marie, veuve depuis des années, qui a élevé Yukiko seule depuis ses 12 ans, l'informe donc, de but en blanc, qu'elle vient de se remarier, sans en parler à personne, et surtout pas à sa fille. Yukiko prend assez mal la chose, d'autant que son nouveau beau-père, Ken, est plus jeune qu'elle, emménage directement avec elles, a un passé d'hôte dans une club pour femmes mûres ( autant dire, un gigolo professionnel), métier qu'il a abandonné pour se reconvertir comme acteur de série télé historiques.
C'en est trop pour Yukiko,qui évidemment pense que sa mère est juste en train de se faire plumer. ( ce qui n'est pas le cas, le nouveau "mari de Marie" est contre toute attente, un type bien, qui a juste un penchant pour les femmes plus âgées que lui, et des goût commun avec elle)
Mais Yukiko qui se sent e trop, quitte la maison familiale pour habiter avec son petit ami... qui devient son mari aussi, au fil des chapitres. Ce qui ne les empêche pas de squatter régulièrement chez Marie et Ken.autour de ce noyau qui refait le monde à table gravitent d'autres personnages:


Izumi, professeur d'université, et ami de Ken, victime de harcèlement ( et même d'agression sexuelle, oui!) de la part d'une de ses étudiantes, une fille étrange qui se complait dans les liaisons sans issue, interdites ou violentes, avec si possible des hommes qui l'humilient et la rabaissent. Elle quitte d'ailleurs aussi sec celui qui aura l'audace de se montrer tant soi peu gentil ( trop faible de son point de vue), avec elle.

Sayako, copine de Yukiko, jolie femme, douce, avenante.. mais incapable d'aimer réellement qui que ce soit. Au grand dam de sa tante qui s'entête à vouloir lui arranger des mariages, avec des prétendants aussi divers que possible, mais qu'elle trouve toujours une raison pour écarter.
Son grand-père qu'elle adorait, lui ayant appris dès son enfance qu'il ne faut jamais faire de discrimination envers autrui, elle a poussé la logique jusqu'au bout, en estimant qu'aimer quelqu'un en particulier, c'est faire une discrimination envers tous les autres. Aimer quelqu'un en particulier, c'est être injuste envers tout les autres.


Il y a aussi Yuko et Saeki, copines d'enfance de Yukiko, qu'on va suivre, cette fois via le regard de Saeki. Elles étaient inséparables au collège, trois filles modernes s'étant promis de ne pas se laisser mener à la baguette dans un monde masculin, de trouver un travail pour elles même et de ne pas l'arrêter ni renoncer en cas de mariage. Yûko, petite fille d'un marxiste, était la plus  versée dans la lutte des classes, mais ses copines n'ont jamais soupçonné ce qui se passait chez elle. Ni la raison qui l'a poussée à quitter le lycée à 16 ans, préférant les cours du soir, qu'elle a aussi fini  par quitter., abandonnant rêves et projets un à un.. pour finir par proclamer que femme au foyer, c'était parfait.
Pourtant les signes étaient clairs, Yuko était toujours blessée, elle évoquait le caractère insupportable de son père capable de se mettre en colère parce qu'elle " respirait trop fort"..mais ses copines n'ont rien vu, ou ont préféré ne rien voir, ne pas lui demander ( on ne se mêle pas des affaires d'autrui, au Japon, fut-ce un cas avéré de maltraitance)

Et pour boucler la boucle, il y a encore la mère de Marie, avec qui elle a es relations encore plus tendues qu'avec sa fille. La raison est simple: Sa mère ne lui a jamais fait de compliment, a passé au contraire son temps à se moquer d'elle toute son enfance, à critiquer ses dents en avant ( alors que Marie a toujours été jolie: résultat, elle n'a jamais cru les gens qui le lui disaient, puisque sa propre mère - plutôt moche depuis toujours- soutenait le contraire, et lui en garde une rancune tenace). On apprend pourquoi, cependant, cet état de fait est le choix délibéré de la mamie, un choix contestable, mais qui lui paraissait être le meilleur possible.

Un josei plutôt sympa, sur les relations familiales et humaines en général, plutôt complexes.qui insiste sur le fait que les actions qui paraissent difficilement défendables partent parfois d'un bon sentiment, mais peuvent empoisonner la vie de quelqu'un durablement, par manque de communication, par volonté de ne pas mal faire, par généralisation d'un concept...

Plutôt sympa, joliment esquissé.. mais qui ne me laissera pas un souvenir impérissable. J'ai l'impression, si réussi soit-il, qu'il m'aurait plus plu il y a quelques années. Depuis, des mangas, livres, films estampillés " tranches de vie", menant une réflexion sur la communication ( en particulier le récent Senses, qui développe bien le sujet" connait-on vraiment ses proches"), il yen a une quantité qui se sont frayé un chemin jusqu'à l'occident, et le sujet parait réchauffé, ou en tout cas, peu original.
Dommage.

mercredi 6 juin 2018

Senses (film 2015)

Il y a quelques temps, j'ai pris la décision, difficile j'avoue, je mettre l'étude du japonais en pause. Pour diverses raisons.
Ce n'est pas un arrêt, mais.. une pause, pour laisser la place à d'autres langues, qui correspondent  d'autres souhaits, d'autres priorités.
Mais je ne tire pas un trait sur 5 ans d'études de la langue et 4 voyages. J'en parle plus longuement ici

Il faut croire que j'ai vraiment du mal à m'en détacher: je l'annonçait le 25 mai, et le soir même j'étais devant les délice De Tokyo avec un pote, suivi dès le lendemain d'une expo sur l'Asie et le dimanche soir devant Zatoichi...
Mais avant de partir en vacances j'avais commencé à voir cette série de films ( 3 films exactement, découpés en 5 parties),  il date de 2015, mais est sorti le mois dernier en France. Et j'attendais donc d'avoir vu l'intégralité pour en parler.

Hop affiche:
Le vrai titre est donc Happy Hour, en kana dans le texte. Mais le titre à l'international n'est pas dénué de... sens, et reste pertinent.

Hop bande annonce, qui invente le concept de "série cinéma".. bon autant dire une pentalogie, comme pour les romans de Shimazaki Aki, si on compte les parties  ou une trilogie si on compte les films.



Donc nus avons 5 parties, liées au 5 sens: dans l'ordre toucher ( et on sait à quel point le Japon n'a pas une culture a priori tactile), entendre, voir, sentir et goûter.

A travers l'histoire de 4 copines qui approchent de la quarantaine. Jun et Sakurako se connaissent depuis l'école, et à leur duo se sont ajoutées, au fil du temps Fumi et Akari. Depuis les 4sont inséparables, font régulièrement des activités ensemble ( pique-niques, sorties, expositions, animations...) qui leur permettent à toutes de prendre du temps pour elles. en effet chacune doit faire face à un quotidien, au mieux  quelconque, au pire, déprimant. Leur amitié et leurs sorties sont leur soupape de sécurité, le seul moment où elles peuvent être elles-mêmes, en toute sincérité, sans avoir à ménager un mari ou une belle famille.

Sakurako est l'exemple type de la ménagère japonaise un peu cliché: femme au foyer, un mari qui travaille, un fils ado un peu difficile, une belle mère qui squatte.. toute une famille qui prend pour acquis le fait qu'elle doive passer sa vie entre la cuisine, le linge et le ménage, sans même penser une seconde à lui dire que ses plats sont bons. son mari n'est pas méchant, mais la regarde à peine, ou alors, some un élément du décor qui a de soi. Seules ses copines la félicitent, et semblent apprécier ses efforts.

Akari est pète-sec, un poil grande gueule et autoritaire, notamment dans sont travail d'infirmière. Elle est très compétente, mais se met toute seule la pression: de fait , elle est constamment sur la défensive, minée par la hantise de faire une erreur qui pourrait entraîner une catastrophe pour un patient ( et pour sa carrière: elle explique être obligée de souscrire une assurance très chère pour faire face aux frais juridiques en cas d'erreur médicale).Et son caractère très droit, limite psycho-rigide l'a menée par le passé u divorce, elle a donc aussi du mal à faire confiance aux gens. Pour elle , ses copines sont les seules qui acceptent ses sautes d'humeur et bouderies sans en prendre ombrage.

Pour Fumi, tout semble aller bien: un travail au centre culturel, un mari éditeur, serviable, qui participe aux tâches ménagères et avec qui elle discute ..sauf qu'on se rend vite compte qu'il s'agit de discussions creuses, de façade, de celles que pourraient avoir de simples colocataires. Et que consciemment ou pas chacun fait tout pour éluder les vrais sujets.

Quand à Jun.. elle avoue enfin à ses copines une chose qu'elle gardait pour elle depuis longtemps, pour ne pas peiner Akari, pour ne pas les impliquer plus que de raison: elle est en pleine procédure de divorce. Son mari n'est pas méchant, mais ennuyeux comme la pluie. Il ne se passionne pour rien hormis sont travail de biologiste et de n'est jamais soucié de ce qu'elle ressentait ( enfin ça c'est sont point de vue. Dans un sens, elle ne s'est jamais non plus vraiment soucié de chercher à le comprendre). Mais lui refuse de divorcer...

Mais voilà, 4 femmes en plein échec sentimental, en butte aux difficultés à communiquer.. mais se connaissent-elles vraiment entre-elles? Se connaissent-elles elles-même?
Le brusque départ de Jun, qui n'a pas gagné son procès ( "mon mari est ennuyeux" n'est pas une raison valide de divorcer lorsque l'autre partie s'y oppose, et ses mensonges cousus de fil blanc pour le faire passer pour méchant et sadique n'ont convaincu personne) met tout le monde face  à ce que personne ne voulait voir : d'abord parce que c'est elle qui avait fait se rencontrer ses copines de divers cercles. Leur amitié peut-elle perdurer sans celle qui en est le ciment?
Et puis 2 divorcées sur 4, ça pourrait bien donner des idées aux deux autres, qui constatent leurs échecs sentimentaux.
En tout cas, elle sème involontairement des graines de révolte dans les esprits.
Même l'ennuyeux mari se révèle moins insensible qu'il n'y paraissait, capable de réflexions profondes sur le sens de la vie... mais malgré tout ces deux là n'étaient juste pas faits l'un pour l'autre.

J'avoue que j'ai été étonnée par ce film.. long, où il ne se passe pas grand chose.
Le cinéma l'a présenté comme un film sur les gens qui disparaissent sans laisser d'adresse, et sur la réaction de ceux qui restent. Je ne m'attendais pas vraiment à quelque chose sur l'échec sentimental, le divorce et le fait d'écouter ses propres sensations et opinions, avant qu'il en soit trop tard.
Il n'y a pas beaucoup d'action, certains passages sont longs au moment du visionnage, mais sont justifiés dans la narration, comme le long moment où Fumi, son mari, Sakurako, et le mari de un prennent part à une lecture en direct d'une longue nouvelle par une jeune écrivaine...suivie d'un débat, mais leurs réactions subtiles à ce moment là vont entrainer une nouvelle lecture des personnages, la mise a clair de non-dits,etc... Ou l'atelier de "connexion sensorielle" au tout début.. qui fait prendre conscience aux copines qu'elles sont dans la survie et non dans l'écoute de leurs sensations, ce qui va mettre en place toute la prise de conscience et les réactions qui s'ensuivent.

Donc, oui,  j'ai bien aimé ce film fleuve ( et heureusement que le cinéma a décidé de programmer de manière assez rapprochée les 3 parties - spécificité de la diffusion en France apparemment, il était diffusé d'une traite au Japon, sans avoir à attendre des semaines ou des mois entre les 3 parties), a priori peu passionnant, mais que j'ai trouvé pertinent. Sans en avoir l'air, il en dit beaucoup sur une société différente de celle qu'on connait, sur ses spécificités, sur les rapports humains... qui décidément ne sont facile nulle part sur le globe, quelle que soit l'approche qu'on choisit: taire les problèmes ou les ressasser... il n'y a pas de solution miracle. Mais visiblement, rien ne se fera si l'ont ne fait pas d'abord une réflexion sur soi-même.. et ça c'est fichtrement intéressant.
Je le recommande, pour peu qu'on aime le côté tranche de vie.

Donc voilà, je n'en ai certainement pas fini avec le Japon, sa langue et sa société ( et ses onsen, le film en parle beaucoup).
Mais pour le moment, c'est la solution que je retiens: continuer à voir des films et à écouter la langue pour ne pas la perdre, à défaut de la pratiquer activement.

une critique intéressante et développée du film, où je retrouve pas mal de mon ressenti.

jeudi 31 mai 2018

Les délices de Tokyo ( film 2016)

Et hop, le second film.
Celui là, je l'avais raté à sa sortie, et là encore quand il a été rediffusé il y a quelques jours sur ARTE. Pas eu le temps de le voir en streaming.

Mais mon pote a eu la bonne idée de l'enregistrer, j'ai donc enfin pu le voir.



Un film qui m'a laissé une impression.. disons mitigée.Tiré d'un roman que je n'ai pas lu, je l'ai bien apprécié sur le moment, mais quelques jours après .. presque oublié en fait.
Pourtant l'histoire est assez mignonne, dans le genre tranche de vie et amitié improbable entre des laissés pour compte.
Mais voilà, est-ce que c'est parce qu'il a eu un assez bon succès à sa sortie? Ou que je l'ai raté plusieurs fois  et qu'à force d'en entendre parler, j'en espérais mieux?

Un monsieur qui n'aime pas ce qui est sucré tient pourtant un stand de rue de dorayaki, ces succulentes crêpes fourrées à la pâte de haricots sucrée ( le goût se rapproche de la purée de châtaigne européenne.
Ses crêpes sont excellentes, mais la farce assez moyenne. Et alors qu'il recherche quelqu'un pour l'aider à tenir le stand, fréquenté par une poignée de lycéennes, la candidate qui va se présenter est une vieille same septuagénaire. Le gérant n'est pas spécialement intéressé par l'idée d'employer une très vieille dame, mais elle insiste, lui fait goûter sa propre pâte An ( c'est le nom de la préparation et le titre original du film), et force est de constater qu'à eux deux, ils peuvent faire des dorayaki comme personne. C'est donc Madame Tokue qui aura le travail, et la nette amélioration de la qualité des produits va faire de la petite boutique un vrai succès commercial.
Mais il y a toujours un mais, que ce soit Sentaro le gérant ou Tokue la vieille dame, tous deux cachent un secret qui fait d'eux des paria. C'est ce versant surtout qui est intéressant:l'oppression d'une partie " invisible" de la population qui n'hésite pas à marginaliser les gens qui ne sont pas aussi lisses que la société le souhaiterait. Le sort qui a été celui de Tokue est, lorsqu'on le découvre, absolument abominable: séquestrée depuis sont adolescence dans une maison de santé, car elle a une maladie, pourtant non contagieuse.
Avec l'aval de sa famille et de la société: on cache les moutons noirs, même s'ils n'ont rien fait de répréhensible, parce qu'avoir une malade dans la famille, c'était la honte- et ça l'est probablement toujours dans certaines familles.

Par contre Wakaba la lycéenne qui hésite à quitter le parcours scolaire pour chercher du travail n'est pas très bien utilisée à mon sens, c'est un personnage silencieux, et au final assez incolore...

Mais Kirin Kiki  l'actrice qui tient le rôle de Madame Tokue campe une mamie absolument adorable et ça fait tellement plaisir que le personnage principal ne soit pas la jolie fille, mais la vieille dame.
Mais c'est un peu le problème, du coup elle est si convaincante qu'elle éclipse les deux autres.

Donc bon, sympathique, à voir une fois, mais sans plus... il ne me laissera pas un très grand souvenir.
Et par contre je meurs d'envie maintenant de manger des dorayaki ...

mercredi 30 mai 2018

Zatoichi ( Film 2003)

Profitant de mon WE parisien chez un pote, afin d'aller en particulier voir les expositions sur les fantômes d'Asie et la cartographie... asiatique, on a joué a fond le jeu et je reviens avec 2 nouveaux sujets films japonais pour conclure le mois japonais.
Qui aurait du finir le 30 avril mais a en fin de compte été prolongé jusqu'à demain.
Et donc premier des deux, Zatoichi, que malgré sa réputation et son lion d'argent, je n'avais pas eu l'occasion de voir.

Ou plutôt j'avais du en voir un autre, ancien, des années 60, car le personnage est récurrent au cinéma depuis les années 60, et au centre de, je viens de vérifier: 26 films. Mieux que James Bond et Batman réunis.

Et la version de 2003, celle de Kitano, hé bien je ne l'avais pas vue ( de mémoire, j'ai en fait vu peu de films de Kitano: Dolls, oui, j'en suis sure, Sonatine et Hanabi, et je ne sais plus si c'était l'été de Kikujiro ou Aniki.


j'aime beaucoup cette affiche, où le sabre fait presque office de pinceau de calligraphie.
Rappelant au passage que la calligraphie faisait partie intégrante du bushido, le code des samouraï


Et tout tourne autour de ce personnage de l'ère Edo, un mystérieux masseur itinérant et aveugle, mais pourtant redoutable au sabre - et évidemment quasiment imbattable en combat nocturne, puisqu'il se bat à l'oreille - qu'il camoufle astucieusement dans sa canne de marche. Et donc ce curieux  et charismatique personnage va de vile en ville, façon "lonesome cowboy" ou Zorro, et rend service à la population en éradiquant les mafieux qui oppressent les villageois. Il va ici être hébergé par une paysanne, qui vit avec son neveu, adulte mais incompétent notoire, un faignant dont la seule activité dans la vie est de jouer, et perdre, au tripot du coin. Zatoichi va vite se rendre compte que le tripot en question est tenu par des mafieux.
L'histoire va se compliquer d'une vengeance exercée pas un duo de geisha ( une femme et son frère travesti en danseuse) à la recherche des gens qui ont massacré leur famille des années plus tôt.


Et bien sûr la version de Kitano hé bien,c'est un film de sabre, comme tous les précédents de la série Zatoichi..mais revu et corrigé à la sauce Kitano: violence très stylisée ( et rapide, parce que trancher quelqu'un en deux d'un coup de sabre, ça ne prend pas beaucoup de temps, au contraire, donc pour le coup les combats sont assez réalistes), sang rouge plus que vif, et.. gags absurdes venus de nulle part. Tel le voisin de la paysanne, un  dinguo qui se prend pour un samourai et passe son temps à courir en rond autour des maisons, muni d'une lance,  et d'un drapeau dans le dos, chaussé de geta et seulement vétu d'un fundoshi ( slip  traditionnel japonais,ce que portent les sumo, vous voyez?).
Ou le neveu qui, ayant appris que la danseuse est un homme déguisé, se met en tête de se maquiller pour être aussi beau que lui.... vivante preuve que ça n'est pas une question de maquillage.
Beaucoup d'absurde et de gags sortis de nulle part, mais aussi jusque dans le scénario qui est à la fois  un hommage au film de sabre, avec des combats bien classes, mais aussi une parodie avec flashbacks et coups de théâtre pas si loin de ceux qu'on pouvait avoir de manière très sérieuse dans les films de ce genre, mais juste un peu plus poussés, juste un peu " trop", histoire de bien se placer dans la parodie ( l'identité du boss de la mafia.. ha c'est lui, ha non c'est pas lui.. non en fait c'est l'autre..), et final mi bollywood, mi claquettes, avec les "morts" de l'histoire qui reviennent saluer. On est bien dans une perspective très théâtrale ( et bon sang, cette toute dernière image, après le générique, complètement dans la dérision).

Il y a quelque chose d'intéressant, un fil directeur sur l'apparence et la fausseté: des deux fausses geisha, la remarque revient sans cesses: elles sont jolies toutes les deux, surtout la fille en rouge.. qui n'en est pas une. Le chef des bandits est bien caché, et bien malin qui pourra le retrouver. Mais au fait, cet aveugle.. l'est-il réellement?
Le regard aussi est omniprésent: l'aveugle se colle de faux yeux sur les paupières pour faire rire, les bandits regardent les filles.. mais ne voient rien, le neveu veut être admiré

Donc oui, j'ai bien aimé ce film de sabre et d'humour, parodique et qui m'a fait passer un bon moment.

dimanche 29 avril 2018

The prison boys ( jeu android gratuit)

Et on continue ce mois japonais avec un jeu android qui est vraiment mon coup de coeur de ces derniers mois. The Prison Boys est un mélange entre plusieurs styles: une grosse partie de visual novel, une bonne dose d'enquête policière, de la recherche d'objets cachés, et une louche d'escape game.
avec en plus, un ambiance années 30 très sympa, jusque dans le style art-déco des menus  et la musique de vieux film un peu tango, un peu nostalgique.

Et un scénario franchement bien ficelé, ce qui n'est pas toujours le cas pour les jeux gratuits.
Et très souvent noir ( je l'avais commencé dans l'optique d'en parler pour le challenge Halloween, mais je n'avais pas assez progressé alors pour en parler)

Et le graphisme très manga est soigné aussi, je vais surveiller les autres productions du même développeur.
Allez, le seul moins que je vais mettre est le problème récurrent de style manga: tout le monde est supposé avoir entre 18 et 25 ans, et .. ces policiers ont l'air d'avoir au mieux 14 ans .
L'intrigue est sombre, vraiment sombre. Attention, on va parler d'extrémisme politique, de répression et de tortures policières, d'emprisonnements arbitraires, de meurtres, de prostitution, de misère et de trafic de drogue. Rien que ça.
Mais les personnages y compris secondaires sont très bien écrits, attachants à leur manière et dans leur histoire qu'on découvre par petites touches.

Le Japon, dans les années 30. Après la 1°guerre mondiale, le pays a opté pour une politique très répressive, et mis en place une police politique spéciale ( qui a réellement existé) nommée Tokkô, qui enquête pour tuer dans l'oeuf toute tentative de rébellion contre la politique en place.
C'est au sein même du Tokkô qu'on va enquêter, en pilotant les jeunes recrues Tetsu et Nagi.

Tetsu est un orphelin issu de la riche famille Akatsuki, élevé depuis l'âge de 8 ans par la toute aussi riche famille Saeki. Il s'entend très bien avec Nagi et Naoya, les enfants de la famille Saeki qui l'ont accepté comme 3° frère.
Et tout trois font partie maintenant de la police Tokkô, pour diverses raisons: pour Naoya et Nagi, c'est une manière de prendre de force leur indépendance de leur famille qui, sans ça, déciderait de tout pour eux, à l'ancienne mode, alors que le pays est en train de s'occidentaliser (carrière professionnelle, mariage, et tout ça). Pour Tetsu, plus qu'un choix idéologique, c'est un moyen d'être indépendant le plus vite possible - comme on s'engagerait dans la légion étrangère en France- afin de ne pas peser trop financièrement sur les gens qui l'ont recueilli etqu'il tient en haute estime, contrairement aux deux "vrais" frères Saeki, qui ont depuis toujours conscience d'être des pions pour leur famille, qui en disposera en fonction de ce qui leur servira le mieux pour assurer leur statut social ( oui c'est horrible, et tout le jeu est comme ça, quand je vous disais que c'est très écrit et recherché pour un jeu gratuit!)



Et donc les 3 font carrière dans cette unité, bien plus crainte qu'admirée par une population très méfiante à leur égard. Autant dire que dans cette circonstance, la suspicion est partout, même entre membres de la police spéciale, car laisser échapper le moindre doute sur le bien fondé des purges, de la chasse aux communistes ou de la torture, serait gagner un aller-simple pour la prison située dans sous-sols du bâtiment de la police, voire pour le cimetière le plus proche.
Gloups, imaginez un jeu où il faudrait piloter les membres du KGB.. ben voilà, c'est presque ça.

Alors oui, ça fout mal à l'aise, MAIS, justement, il s'agit de jeunes gens qui vont peu à peu découvrir la réalité de ce qu'ils font, et remettre en question l'organisation. De fait, il n'aiment pas ça, les interrogatoires ou la torture, mais les uns pour échapper à leur famille, les autres pour échapper à la misère qui règne dans un pays touché par la crise, ou parce qu'ils sont trop naïfs politiquement, ils n'ont pas eu vraiment d'autre choix que de s'y engager.
Et on découvre donc peu à peu les différents protagonistes et leurs raisons d'être là. Personne n'y est vraiment par goût de la cruauté, rassurez-vous.

Dans cette ambiance déjà morbide, se produit un événement particulièrement macabre: un des personnages, qu'on venait pourtant de présenter comme presque un des principaux, est trouvé mort pendu, et de fait, il reste central post-mortem, étant celui qui fait involontairement voler en morceaux cette belle organisation de façade.
Le général a décidé que c'était un suicide, vous êtes donc priés de valider la thèse du suicide sans bronche. Ce qui n'est évidemment pas la réalité.
L'enquête est d'abord de trouver la vraie cause de la mort de XXXX, et que cache la police politique au font de ses sous-sols. Tout en découvrant que parfois les gens qu'on connaît depuis toujours cachent un second visage que l'on imaginait pas.

Et c'est passionnant. Parce que c'est bien écrit, que je le disais, les personnages y compris secondaires ne sont pas aussi simples que l'on peut le croire au départ, que les énigmes à résoudre pour avancer sont parfois tordues mais pas trop non plus ( et au pire une recherche sur un site de walkthrough peut suffire à débloquer lorsqu'on ne sait plus où aller), qu'il y a une grande quantité de fins possibles ( et je ne vous le cache pas, presque toutes mènent à une mort certaine pour l'un ou l'autre des gentils héros), mais même si c'est violent, ce n'est pas du grand-guignol gratuit. Mais si c'était un manga, ce serait un seinen, par le côté adulte et sombre des thèmes.
Donc pour moi, une vraie réussite (je ne suis pas encore tout au bout, donc je ne connais pas encore toutes les fins possibles)


notre gentil héros Tetsu.
Pour débloquer les fins alternatives, j'ai du le faire mourir plus d'une fois, et j'étais presque à dire  " désolé mon ptit Testsu, c'est le jeu qui m'a obligée, je ne voulais pas" à chaque fois que ça arrive. Car oui, les différentes fins ne font pas dans la dentelle.

Je le disais, c'est gratuit, ce qui veut dire une pub par-ci par là, mais elles ne sont pas envahissantes. Il y a un système de tickets ( 5 par jour avec un bonus sur les 10 premiers jours, ce qui permet quand même d'avancer dans l'histoire sans trop traîner. On peut si on veut acheter des tickets pour aller plus vite, et en bonus, supprimer la pub, mais ce n'est pas nécessaire pour avancer du moment qu'on a un peu de patience.
Et lorsqu'on tombe sur une fin, il faut parfois revenir en arrière pour en voir une autre/continuer à avancer dans l'histoire, mais, c'est bien agréable, un chapitre débloqué le reste. Pas besoin d'utiliser de nouveaux tickets, ce qui veut dire qu'une fois qu'une chapitre est débloqué , il le reste et  est rejouable à volonté ( il y a aussi un petit bonus de cartes à collectionner, qui donnent des informations annexes sur les personnages, je pense qu'une fois qu'on a tout débloqué et tout récupéré, il y a accès à une fin alternative supplémentaire, ou quelque chose de ce genre)

Evidemment le bémol - qui n'en est pas un pour moi - le jeu n'est pas en français, mais existe en anglais, avec la cerise sur le gâteau: hormis quelques rares coquilles, l'anglais est soigné, et je n'ai pas vu de phrases vraiment incompréhensibles.

Donc franchement, je le conseille vraiment: une bonne durée de jeu, plein de fin alternatives, une traduction soignée, une ambiance sombre, des personnages attachants et travaillés, le fond est réussi et servi par une forme qui cadre bien avec l'époque de l'histoire, que demander de plus pour ZERO  euros?
Allez, je conclus en disant que ça me plaît tellement que j'aimerais bien voir un jeu alternatif qui reprendrait les personnages dans d'autres enquêtes ( allez on efface tout ce qui s'est passé et on dit que personne n'est mort).

Pour télécharger, c'est ici.

samedi 28 avril 2018

Le goût du Japon ( Collectif)

J'avais déjà parlé ici du Goût de Kyotô, voilà un second ouvrage de la même série.
Il s'agit de tout petits livres de poches, une centaine de pages à chaque fois , sur des thèmes aussi variés que le café, la couleur noire, l'amitié, l'argent, l'automobile, telle ou telle ville , telle ou telle région..), qui présentent à chaque fois une sélection littéraire  sur le sujet proposé.

une lecture tranquille, où l'on peut piocher à sa convenance un texte de-ci, de-là

Kyoto se rapportait donc à la ville de Kyotô, ici, c'est le Japon en général. on y trouve donc une petite sélection de textes extraits de romans ou d'essai - donc certains que j'ai présentés déjà ici,comme les Japonais de Karyn Poupée, ou récemment Pays de Neige de Kawabata Yasunari.

Le tout est divisé en sous thèmes: l' Approche du Japon ( principalement des textes d'auteurs non-japonais qui racontent leurs premiers contact avec le Pays, que ce soient les premiers jours d'expatriés de LafcadioHearn au  XIX° siècle ou la découverte de l'art japonais, bien avant celle du pays de Claude Levy-Strauss); Vivre au Japon ( encore un peu de la vie quotidienne de Lafcadio Hearn, ou l'étude de Roland Barthes sur l'"empire des signes", du père Frois, religieux portugais installé à Nagasaki au XVI° siècle, mais qui donne aussi la parole à des auteurs japonais comme Sôseki ou Kawakami Hiromi histoire d'avoir aussi le point de vue "local" sur la vie quotidienne, avant d'enchaîner sur les étrangetés: Le tatouage vu par Tanizaki, le Kendo vu par Mishima, la philosophie qui sous-tend le Kyûdo, un extrait du dit des Heike , un poème médiéval sur le saké, une réflexion sur le Nô...
Alors oui ce genre d'anthologies est forcément frustrant lorsqu'on trouve un extrait qui attire, mai c'est aussi un moyen de se donner des idées de lectures, donc de temps en temps j'aime bien en lire une et noter des choses que je n'aurais pas forcément trouvées par moi même, ou, en tout cas, pas de suite...

Là en l'occurrence, ça me confirme que j'ai bien raison d'avoir mis Lafcadio Hearn dans ma PAL, j'y ajoute aussi le Dit des Heike, et j'y remets Sei Shonagon ( j'avais commencé son livre de chevet, il y a plus de 10 ans, mais j'avais du l'arrêter pour une raison XYZ à l'époque, et.. je ne l'ai pas retrouvé quand j'ai voulu le reprendre.. il me semble l'avoir retrouvé et rangé correctement depuis mon déménagement..)

lundi 23 avril 2018

Ôke no monshô tome 3 - Hosokawa Chieko

En triant mes articles, je suis retombé sur ce vieux titre, donc j'avais chroniqué les 2 premiers tomes. Je m'en souvenais bien, surtout, de l'énorme déception qu'avait été le tome 2 après un tome 1 assez prometteur.

Je n'avais pas franchement eu envie d'y revenir depuis 4 ans, mais là, je ne sais pas pourquoi, la semaine du shojô aidant, et j'avais besoin de rigoler un peu, je me suis dit " tiens si j'allais voir du côté du manga Benny Hill" ( rapport aux nombre colossal d'enlèvements, de fuites, poursuites, rattrapage, séquestrations, re fuites, re poursuites...).
Oui , comme je lis peu de shojô, j'ai eu envie, avec une bonne dose de masochisme, d'aller rechercher le plus raté que j'aie lu depuis des années.

Parce qu'il y a le bon shojô et le mauvais shojô ( oui, comme pour les chasseurs et le hard-rock). Et làààààà...

C'est parti pour une chronique moquerie. Sifflez j'm'en fous, c'est tellement kitsch que ça en devient rigolo.

Tome 3

J'avais dit en 2014 qu'il y avait 57 tomes, en me demandant qui pouvait bien le suivre depuis le début avec autant d'intérêt, étant donné que les grosses ficelles se voient des le second tome. 4 ans après, la série est toujours en cours, et compte maintenant 62 tomes. Ca doit être un record pour un shojô. Et je sais qu'il y a zéro chance  que j'ai  courage  d'aller jusque là ,mais juste par curiosité, j'ai eu envie de voir  comment le graphisme très seventies avait évolué en plus de 40 ans.
La série a débuté en 76, Carol a 16 ans, la série continue en 2018, Carol aurait donc maintenant 58 ans si la publication avait calqué sa temporalité sur celle du réel. Je ne vous apprends ren en disant que ça n'est pas le cas.. En tout cas le lectorat cible qui avait son âge à l'époque a donc presque la soixantaine.
Le plus étonnant, c'est qu'il doit y en avoir pour s'accrocher, sinon ça aurait fini depuis longtemps. Mais j'ai du mal à imaginer que quelqu'un puisse suivre avec passion depuis 42 ans cette histoire en attendant avec impatience chaque nouveau tome, ou une hypothétique fin.
Allez, c'est parti pour pour la fête du facepalm.

versus tome 62. Elle est toujours ado. Et  je préfère le graphisme vintage du début.
Sérieux, la position des bras? L'impossible angle de sa main et de son coude droits? les proportions? Je ne sais même pas par où commencer pour me désespérer. C'est quand même rare qu'un dessinateur ou une dessinatrice arrive à faire pire qu' avant avec des années de pratique.
Donc le tome 3, qui n'a peur de rien, et surtout pas d'en faire des caisses, s'ouvre carrément sur une citation du livre des morts de l'Egypte ancienne ( via le japonais, traduit en anglais, je ne jugerai donc pas la justesse de la citation, hein...)



Résumé: nous avions laissé Carol, lycéenne américaine qui habite au Caire, 16 ans d'age physique, 6 ans d'âge mental. Une sympathique idiote héroïne blonde victime d'une malédiction antique,  tome 2qui se réveillait à la fin du au bord du Nil, de retour d'un voyage dans le passé, où elle avait été enlevée, séquestrée, réduite en esclavage par un couillon pharaon érotomane, et menacée de mort par la soeur du pharaon en question.

Un qui veut se la taper, l'autre qui veut la trucider. Sans compter un prêtre qui la voulait comme objet de collection, parce qu'il collectionnait les objets dorés, et qu'étant blonde, elle serait décorative dans son appart'. A peu près...en tout cas le rôle de la potiche lui irait comme un gant.

les ravages de la katakanisation des noms retraduits par une équipe qui n'a pas ouvert une encyclopédie sur l'histoire égyptienne.
Donc Ashisu est en fait Isis, et Menfuisu =Memphis, prononcés à l'anglaise.
D'ailleurs, plusieurs équipes se sont partagé les chapitres sans se consulter, et parfois, les noms sont retranscrits normalement.

Voilà donc Carol de retour au Caire en 1976, qui a au passage commodément perdu la mémoire de ses divers enlèvements et péripéties antiques. Sauf qu'elle a plus où moins des flashs inexplicables, où elle entend des voix qui la menacent de la retrouver où qu'elle soit. En bonne santé, mais ses proches la trouvent distante, inquiète et sur le qui-vive, ce qui peut se comprendre ( et en plus cette fille a la poisse: où qu'elle passe les meurtres se produisent à moins de 100 m d'elle)


Ho, un cadavre éviscéré et préparé comme une momie antique, on lui a même enlevé le cerveau par les trous de nez...regardez les enfants et instruisez vous!
Sinon, il vous vient à l'idée d'appeler la police, bande de clampins? Au lieu de débattre en disant que quand même  " c'est très cruel"...
accessoirement, cette case me fait marrer. Il ne manque qu'un chien et on se croirait dans Scoubidou.

Son frère Ryan ( le mec en pantalon pattes d'eph' qui semble passer sa vie à cloper où qu'il soit, salon des parents ou réserve de papyrus antiques, bravo champion...) se dit que pour son bien-être, il faudrait peut-être qu'elle reparte quelques temps avec lui aux States. Avoir perdu la mémoire et vu un cadavre de près n'est peut-être pas très bon pour sa santé mentale. Tu m'étonnes...

Mais Carol ne veut pas: l'archéologie c'est sa passion, et elle ne veut pas non plus s'éloigner de Jimmy, son petit copain. Et donc, promis, juré craché, je vais revenir, et on va boire ensemble l'eau du Nil pour sceller le pacte.
De mon côté, la seule conséquence possible que je vois à cette action c'est de choper une amibiase.

Mais alors qu'elle visite le temple d'Abou Simbel avant de repartir bien plus de force que de gré, qui donc lui apparaît?

Allez, je brise de suite ce suspense insoutenable: Isis, la soeur du pharaon qui vient juste de passer 2 tomes à essayer de tuer Carol.
Qui lui dit, les yeux pleins de larmes, à quel point son frère est triste depuis qu'elle a disparu, qu'il la cherche partout, et n'écoute plus personne, avant de conclure logiqment par " c'est pour ça que je vais te buter et lui montrer ton cadavre pour qu'il comprenne qu'il doit définitivement laisser tomber l'affaire" ( en fait ce manga est bourré de répliques absurdes de ce genre, qui devaient peut être effrayantes ou mignonnes, ou que sais-je en 1976, mais sont hilarantes en 2018).
Avant de la pousser du haut d'une falaise ( ouiiiiiiii, merci Isis, j'avais tellement envie de le faire!)

Tentative de meurtre qui a pour effet de réveiller ses souvenirs en criant " haaaa je tooooooombe, je me souviiiiiiens de toooooout maintenaaaaaaant".

Je ne vous cache pas que j'aimerais tant qu'Isis arrive à ses fins. Mais non c'est le tome 3, il y en a 62 et c'est encore en cours. Ce n'est pas demain la veille que Carol va crever. Navrée!

Plouf dans le Nil. Et lorsqu'elle émerge: retour en antiquité. Tant d'imprévisibilité scénaristique me sidère :D

Et évidemment lorsque le général Laglue - en fait il s'appelle Minue, mais j'ai envie de l'appeler Potdecolle ou Laglue, ça lui va mieux-  la retrouve vivante près de 10 jours (antiques) après sa disparition dans le fleuve, tout le monde en déduit qu'elle n'est autre que la fille du dieu du Nil.

Joie et bonheur pour le pharaon qui a découvert le concept de syndrome de Stockholm avant même que la ville n'existe et se dit que s'il la séquestre suffisamment longtemps et la fait bosser comme esclave, elle restera volontairement. Et qui enchaîne des phrases type " puisque tu me repousses, qu'on te jette en prison, la journée tu fabriqueras des briques d'argile au soleil et si tu tentes de t'enfuir j'ai donné ordre qu'on te coupe les mains, qu'on te tartine de boue et qu'on te laisse mourir dans le désert... Pourquoi tu me détestes alors que je t'aime?"

parce que c'est le seul facepalm que j'ai trouvé qui soit relié à l'idée de pharaon.
Euh... je peux me tromper, mais je pense que foutre quelqu'un en prison, le menacer et le torturer n'est pas la meilleure approche possible.
Après, c'est supposé être un shojô, (bien que certains aient du mal  à le classer  et l'estiment être un seinen. J'ai du mal à le croire avec la couverture du tome 62: des coeurs du rose et "princess comics". Mouais, il y a peu de chances.), mais j'avoue que le diablotin cynique en moi a presque envie de voir la chose évoluer en SM.

Sinon, vieux, t'as pensé que si c'est la fille du dieu du Nil comme tu le crois, c'est une très mauvaise idée que de la torturer et de se mettre à dos son papounet? Hmmm? Yep, le dieu qui fait déborder le fleuve tout les ans pour fertiliser les rives et faire pousser la bouffe.

D'autant qu'elle fait des "miracles" auprès des esclaves. Ouaip, carrément!

Avec sa science "basique" du XX° siècle, elle sait transformer l'eau boueuse qui empoisonne les esclaves en eau potable, avec du sable, du charbon et des cailloux (euh, certes.. c'est une méthode classique de filtration, mais de là à dire que c'est une base de la connaissance pour une gamine de 16 ans du XX° siècle. Ca ne l'est pas non plus au XXI° au passage). Ce qui fait que tout les pécores du coin croient dur comme fer qu'elle est vraiment liée au dieu du Nil.

mais bien sûr, c'est la base des bases pour un enfant du XX° siècle.

Car évidemment, les techniques de survie en milieu hostile sont enseignées dès l'enfance dans les riches familles du XX° siècle, en même temps que les danses de salon ou la reconnaissance des couverts. Merci Mme de Rotschild.
C'est moi ou bien... nonon, rien.

Non, parce que, par contre, savoir filtrer l'eau à la méthode antique devait effectivement faire partie des connaissances de base pour ne pas mourir de soif de l'égyptien lambda qui vivait à la frontière du désert avant même de savoir marcher.

Enfin, bref, un prêtre finit quand même par se dire que si elle est vraiment d'ascendance divine, lui faire du tort est peut être un risque de se prendre une malédiction dans la tronche. Et que, bèèèè, faudrait p't'être éviter. ENFIN!

Mais le tome se conclut par un suspense terrible... hé oui car Carol, considérée comme demi-déesse, et forcée par la populace à envisager un mariage avec le pharaon - qui vient de tenter de la faire crever de deshydratation- auquel elle a répondu en gros " Bon, j'vais réfléchir. M'embrasse pas je pue <pelle> Ho bon, finalement, fais comme tu veux", rencontre par hasard un marchand sur le heu... marché dont le lecteur sait déjà qu'il est l'héritier du royaume de Palestine, venu ici à la recherche de sa soeur qui avait disparu alors qu'elle venait par là justement pour se marier avec le Pharaon.
Ho mais que vois-je arriver? Un enlèvement ?noooooon pas possible...

Bon, j'ai bien rigolé, je sais que ce n'était pas le but, je sais aussi que je n'irai pas très loin dans cette histoire qui devient de plus en plus absurde à chaque page. P't'être qu'un jour j'en lirai encore un ou 2 tomes, à petites doses (parce qu'il est disponible gratoche en ligne et que j'aurais envie de rire ou de me moquer) Mais ça s'arrêtera là.
Par contre j'ai trouvé pas mal d'avis de gens qui eux aussi trouvent ce titre abusivement mauvais, et le mettent en parallèle avec une autre histoire de voyage dans le temps " Anatolia Story"  bien plus réussi de l'avis général.  Et il semble beaucoup plus court!

Apparemment, il est dispo en scan trad en français mais je n'arrive pas à l'afficher chez moi. Et déjà ça menace de promettre: il est interdit aux moins de 18 ans. Merci de cliquer sur le lien uniquement si tu as plus de 18 ans. Ca me fera toujours marrer ce genre de "précaution"

Yes! du sang! de la violence! des gros mots!
Mais, surtout, j'espère, un scénario qui arrête de considérer que l'enlèvement est un ressort miracle tous les 2 chapitres pour faire avancer l'histoire.

promis le prochain shojo sera un bon!

vendredi 6 avril 2018

Mary et la fleur de la sorcière (long métrage d'animation - 2017)

Qu'est-ce qui se passerait si on mélangeait disons.. les Studios Ghibli et Harry Potter?
L'idée est cool non?

Et pourtant, ce n'est ni Ghibli, ni Harry Potter, mais ça y ressemble beaucoup!


Tiré d'un roman que je ne connais absolument pas ( The little Broomstick), on y suit Mary, petite fille rousse à couettes.
Mary est assez maladroite, solitaire, et complexée par sa couleur de cheveux. Elle vient d'emménager chez sa tante Charlotte, une vieille dame sympathique et aisée ( elle a une grande maison, un jardinier et une cuisinière) et attend en s'ennuyant l'arrivée de ses parents et le début de l'année scolaire. Il n'y a pas grand monde dans ce patelin nommé Manoir rouge, et on ne peut pas dire que la première rencontre avec le seul autre enfant du coin , un garçon nommé Peter se soit bien passée: elle a commis une maladresse, s'est retrouvée avec un panier de feuilles mortes sur la tête et Peter s'est moqué d'elle et, sans le savoir, de son complexe en la traitant de " petit singe roux".

Dans son ennui, Mary va un jour suivre non un lapin blanc, mais Tib le chat noir (et Gib le chat gris, moins important dans l'histoire, ce sont les chats de Peter), qui la conduisent dans la forêt, où elle trouve une fleur brillante qui ressemble à un muguet violet et déplait beaucoup aux chats. Lorsqu'elle la montre au jardinier, celui ci lui explique qu'elle est très rare, ne pousse que tous les 7 ans, et s'appelle " vol-de-nuit".

Po... Ponyo? C'est toi?

Lorsque Mary retourne dans la forêt pour chercher les chats qui ont disparu, elle trouve cette fois un balai pris dans des racines d'arbres ( la raison de sa présence ici est expliquée dans le prologue: une sorcière qui ressemblait beaucoup à Mary l'a perdu ici alors qu'elle fuyait après avoir volé des graines magiques.. celles de la plante à fleurs violettes). Par suite d'une maladresse, Mary écrase une fleur sur le manche du balai qui  s'anime.. et l'emmène droit dans la cour de l'école Endor, une école de magie, où on la prend pour une sorcière - puisqu'elle vient d'arriver à cheval sur un balai.



Et une sorcière particulièrement puissante puisqu'elle maîtrise d'emblée des sorts compliqués et qu'elle est rousse.
Sauf que ce n'est a priori pas Mary qui a des pouvoirs, mais la fleur écrasée qui lui en donne temporairement. autant dire que les choses vont se passer moins bien lorsqu'on va découvrir qu'elle n'est pas une sorcière mais une moldue intruse sans pouvoir particulier qui n'a rien à faire là. Elle va se mettre dans le pétrin et par maladresse (une fois de plus) met également Peter qui n'avait rien demandé à personne, dans le même pétrin...

Voilà un film sur lequel j'ai bien du mal à me faire une opinion en fait... Il y a du bon, et .. du moyen ( mais pas franchement de mauvais par contre)

Réalisé par Yonebashi Hiromasa ( Arrietty, que j'ai vu l'an dernier, mais pas présenté ici), ce n'est pas son premier film donc, mais c'est son premier au sein d'un studio autre que Ghibli... et pourtant on dirait du Ghibli, juré craché.

En fait, il s'agit même du tout premier film du studio Ponoc, fondé par d'anciens du studio Ghibli, et l'influence est plus que visible: de grands espaces, de la verdure, des poursuites aériennes sur une musique qui ressemble beaucoup à celles de Joe Hisaishi...

Donc c'est à la fois bien en ce sens qu'un second studio émerge alors qu'avec la retraite-mais-peut-être-pas des deux principaux réalisateurs, Ghibli semblait avoir des difficultés, mais un peu dommage qu'il ne prennent pas ses distances avec son grand frère.
Et, comme je le disais, c'est un premier film, donc,il est tout à fait logique qu'il soit encore baigné dans cette influence, dont il lui faudra peut-être un peu de temps pour s'éloigner et trouver ses marques pour développer sa propre identité.
Mais, l'influence est là, jusqu'au nom du studio: " Ponoc "est un mot croate apparemment qui signifie "l'aube" ou l'aurore". Ghibli est un nom de vent italien, donc les deux font référence à l'Europe et très exactement au même coin de l'Europe du sud, d'une part et d'autre de l'Adriatique.

Et visuellement le film est bourré de références à ceux de Ghibli. Graphiquement, c'est du Ghibli, pas de mauvaise surprise de ce côté là, c'est magnifiquement beau.

Mentions spéciales à l'incendie du début, au rendu du brouillard et des grands espaces de verdure, et à la directrice de l'école qui apparait dans une fontaine, manipulant l'eau à son image.


A commencer par Mary, petite rousse aux faux-airs de Ponyo et  Nausicaa, à cheval sur un balai, accompagnée d'un chat noir, qui vit avec une tante et sa cuisinière ( souvenez vous de la vieille dame aux tourtes dans  Kiki). Il y a même un enfant qui fait des livraisons ( ce n'est pas Mary, mais Peter.. qui se promène à vélo, comme Tonbo, le nouvel ami de Kiki, tiens).

Mary a dos de balai est attaquée par des créatures ressemblant à des poissons volants, mais ça rappelle beaucoup la scène où Haku le dragon était poursuivi par des oiseaux de papier. D'ailleurs c'est un pont qui marquait la frontière entre le village et les bains dans Chihiro, ici, c'est le même genre de pont qui marque la séparation entre la route et la forêt, où il ne faut pas s'aventurer quand il y a du brouillard.
Il ne faut pas entrer dans la forêt les jours de brouillard, on risque de s'y perdre. Vous avez tous deviné ce qui va se passer.



L'extérieur de l'école Endor, de bric et de broc, et flanqué d'escaliers ardus, rappelle à la fois ceux des bains de Yubaba et le château de Howl.. Et le monstre qui engloutit Peter tient un peu du dieu cerf qui cherche sa tête et de "sans-visage".

Toute ressemblance est.. absolument pas fortuite! Il faut n'avoir jamais vu Chihiro pour ne pas la repérer tant elle crève les yeux.
Mary qui arrive sur une île inhabitée est découvre une maison magique où elle semble attendue.. la scène semble vraiment un décalque de Chihiro qui arrive chez Zeniba après son voyage en train aquatique.

Le problème n'est pas qu'il y ait des références, mais qu'il y en ait trop, beaucoup trop, visuellement, narrativement, partout, à tel point qu'il devient difficile de suivre le film sans les chercher, ou sans qu'elles ne vous sautent aux yeux même sans les chercher. Et parfois au détriment de l'histoire.

Une autre plus inattendue: le petit Peter, avec sa caquette... a tout d'un dresseur de Pokemon.
Il y a de bonnes choses, mais... Peter en particulier est peu exploité. Autant Mary est , comme on en a l'habitude chez Ghibli, un personnage qui va dépasser ses doutes et essayer de réparer ses bourdes, autant Peter ne sert pas à grand-chose et récupère le rôle de la damoiselle en détresse qu'il faut sauver.
En terme de jeux vidéo, ça serait un PNJ, et sa quête est de le sauver des griffes de la directrice de l'école de magie.

il sert tellement peu qu'en fait je n'arrive pas à trouver d'illustration " casquette". Mais bon, il a quand même le blouson de sport de Sacha. Ils ont même attrapé 2 Miaouss!


La relation d'amitié entre lui et Mary n'a pas été suffisamment développée avant pour être vraiment crédible ( ils se sont rencontré 2 fois.. et les 2 fois ont fini en dispute, du coupon a plus l'impression que Mary vient à son aide par culpabilité de l'avoir impliqué là dedans, que par altruisme et/ou amitié). On sent bien l'ambition de faire quelque chose d' épique dans la veine de Chihiro, en un peu plus enfantin, peut être, mais il manque en face de Mary un personnage aussi complet et complexe que l'était Haku (mais je suis partiale, je trouve que Haku est un des personnages - je ne peux pas vraiment dire secondaires, mais autres que le héros- les plus aboutis de l'ensemble des films Ghibli.. et puis c'est un dragon, on peut difficilement rivaliser avec ça en termes de charisme!)


Tante Charlotte aussi aurait mérité un peu plus de développement.

Le professeur de science/ magie. Il me rappelle vaguement un autre personnage mais alors là, j'ai un trou de mémoire et je n'arrive plus à m'en souvenir, c'est agaçant.

Il y a des choses un peu attendues ( ce qui arrive à Gib, ou l'identité de la sorcière du début), d'autres... qui m'ont agréablement surprise, dans les thématiques:
[spoiler] je ne m'attendais pas en entrant au ciné à une réflexion sur les tests sur animaux, même si on la voit arriver pendant le film, ou à in fil directeur sur l'ambition démesurée et la création de surhommes. Avec le monstre qui avale Peter à ce moment là, c'est carrément à Akira que j'ai pensé, et à la métamorphose monstrueuse de Tetsuo que j'ai pensé.[fin spoiler]
Ca c'était la référence surprise qui fait plaisir. Parce que je ne l'avais pas vue venir. Parce que hors Ghibli, et c'est ça qui me donne une sorte d'espoir de voir peu à peu ce nouveau studio sortir de l'ombre de Ghibli et explorer d'autres voies.

Donc voilà, un film sympathique que malgré ses nombreux clins d'oeil, j'ai pris plaisir à suivre sur le moment, mais qui ne me laissera un souvenir très mémorable en lui-même.
Mais en même temps, ça fait plaisir d'assister aux débuts d'un nouveau studio. Donc je pense que Ponoc a un bel avenir, pour peu qu'il se détache de son grand frère pour essayer de trouver ses marques, probablement en se cherchant un peu au départ... (et puis Ghibli aussi n'est pas exempt de ratages, j'ai nommé: Terremer. Vu deux fois - parce qu'il ne m'avait laissé aucun souvenir la première et pour cause: il est raté et je crois que mon cerveau avait décidé de faire jouer la mémoire sélective)

Ils ont déjà retenu le meilleur chez Ghibli, à sa voir l'exigence visuelle sans sombrer dans la facilité d'un film en images de synthèse, et la volonté de ne pas occulter des thèmes durs et adultes dans un film destiné à un public jeune. Reste à trouver leur propre patte, à éviter de faire des citations toutes les 2 minutes, à ne pas sacrifier els personnages secondaires et à ne pas semer trop d'indices qui font dire " ça, je le voyais tellement venir!", mais je dirais que ça s'annonce plutôt bien.

le vendredi , c'est films et séries!

jeudi 5 avril 2018

De toutes les nuits, les amants - Kawakami Mieko

Voilà un livre que j'ai ms.. un an à lire.
Commencé en mars 2017, au moment où je changeais de travail, je l'avais mis en attente,  au fil des divers challenges, et je me suis enfin décidée à lire les quelques 30 pages manquantes pour ce nouveau mois japonais.



Du même auteur,je n'avais pas gardé un souvenir impérissable de Seins et Oeufs, qui a pourtant eu un succès tel que j'avais eu du mal à l'emprunter à la médiathèque, tant il était demandé.
J'ai voulu donner une nouvelle chance à Kawakami Mieko et.. force est de constater qu'une fois de plus, je suis passée totalement à côté. Je lui redonnerais peut-être à nouveau sa chance si l'occasion se présente ( je suis tenace et en général, si les 2 premières lectures sont un demi- échec, je vais jusqu'à la troisième pour être sûre. bon, ça ne sera pas dur, seuls 3 titres sont traduits en français actuellement).

Mais comme pour l'oeuvre précédente, les personnages sont si peu caractérisés qu'on peut difficilement s'y attacher.

La narratrice et.. on ne va pas dire héroïne, mais personnage principal, est une femme de 35 ans, Irié Fuyuko. Son travail de correctrice d'abord en maison d'édition puis indépendante ne l'intéresse pas, ne l'ennuie pas non plus.en fait et c'est bien le problème: RIEN ne l'ennuie ni ne l'intéresse. Elle se laisse vivre: des milliers de livres lui passent sous la main mais elle ne lit pas. Elle n'aime pas spécialement la musique, ou le cinéma, ou quoi que ce soit. Elle n'a aucune vie sociale, et refuse les sorties entre collègues, non parce qu'elle aurait quelque chose d'autre à faire mais parce que rien au monde de l'intéresse. Elle se met dans son coin, ce qui fait que les autres la mettent aussi de côté, jusqu'au harcèlement. Mais même là, sa seule réaction est de passer indépendante , histoire d'avoir encore moins de raisons de sortir de chez elle. Comment voulez-vous prendre parti pour un personnage pareil? Et même lorsqu'elle sombre dans l'alcoolisme à force de n'avoir aucun centre d'intérêt, difficile de la cerner, tant elle fait ça comme elle aurait aussi bien pu décider de tricoter pour s'occuper les mains par exemple.

Et donc cet incolore personnage va pourtant laisser 2 personnes se rapprocher d'elle. Enfin, si on peut dire: elle va plus ou moins développer une sorte d'amitié avec Hijiri, une des personnes qui lui amène du travail, et Monsieur Mitsutsuka, un professeur de physique chimie rencontré par hasard, en oubliant assez souvent que sympathiser avec quelqu'un est une chose, mais entretenir une relation implique quand même un minimum d'effort. effort qu'elle est incapable de faire sans le coup de pouce de l'alcool, et donc, elle ne s'aventure hors de chez elle que lorsqu'elle est passablement ivre.

Ca à l'air ennuyeux et.. hé bien, ça l'est. Pour moi en tout cas.
L'action n'avance jamais puisque soit Fuyuko reste chez elle à picoler, soit elle essaye de communiquer mais n'y arrive pas parce qu'elle n'a pas les idées claires. A se demander comment les autres arrivent à ne pas la planter là comme un radis devant tant d'inertie.

Dommage, parce que comme Seins et Oeufs, par moments, il y a quelques idées intéressantes, mais pas très bien menées ou exploitées. Celle de quelqu'un trop introverti qui sombre involontairement dans l'alcool pour se donner du courage est un bon départ, mais il faut quand même la faire évoluer, pas rester sans cesse à ce point A sans aller plus loin.

Il y avait aussi une idée intéressante: la seule chose qui.. on ne va pas dire intéresse, mais fasse sortir Fuyuko de son inertie, ce sont les lumières: celle qu'elle sort voir la nuit, une fois par an, le soir de son anniversaire, et qui scintillent aux fenêtres. Ce qui fait qu'elle va avoir un vague sujet de conversation avec un professeur de physique. Pour elle , les lumières sont un plaisir visuel, pour lui, c'est surtout un champ d'étude, les ondes, les photons tout ça...Ils ont un sujet d'intérêt commun, mais visiblement, pas sous le même angle d'approche.

Le traumatisme subi aussi lorsqu'elle avait 14/15 ans aurait été intéressant, mais.. non. Victime d'une agression sexuelle, mais elle n'est pas vraiment ni choquée, ni en colère, ni révoltée, ni quoi que ce soit. a peine si elle a conscience d'être une victime. On dirait que tout ça lui passe complètement au dessus, comme tout le reste.

Elle était déjà renfermée sur elle-même auparavant, a n'arrange pas les choses, mais ça n'est pas non plus l'élément déclencheur qui pour justifier ce blocage.
Hijiri est plus intéressante ( une femme forte, à qui Fuyuko aimerait ressembler, qui aime les difficultés parce qu'elle aime relever des défis) mais... peu exploitée.
Et, du coup, la toute fin ou Fuyuko et Hijiri semblent être enfin devenues vraiment bonnes copines fait presque tâche,tant elle n'a pas été suffisamment amenée pendant.. tout le reste. Il y a un trou de 2 ans entre le récit et sa conclusion, entre l'immobilisme et enfin un changement de situation.. et c'est pile ce qu'on aurait voulu savoir, comment Fuyuko a enfin réussi à surmonter ses réticences, qui est éludé.

Et c'est encore plus  déconcertant de trouver des qualités à quelque chose de si.. platounet par ailleurs. De ce que j'ai vu sur les blogs,soit on adore, soit on déteste, et bien même pas dans mon cas. Je l'ai fini juste parce qu'il ne me restait que quelques pages à lire, mais sans y trouver beaucoup de plaisir. Je ne peux même pas parler de déception, vu que je n'avais pas énormément d'attente sur ce livre.

2° lecture du même auteur, et 2°fois que je lui reproche les mêmes choses, ça s'annonce mal, je sens qu'elle n'est tout simplement pas pour moi. Alors que le courant est passé de suite avec Yoshimoto Banana par exemple. Dommage.
5 avril: thématique spéciale "plume féminine".