Babelio a organisé en décembre dernier une opé masse critique, comme ils le font régulièrement, spécial BD/Manga, et j'avais repéré ce titre dans leur liste. Coup de pot, il n'a pas intéressé beaucoup de monde.
C'est vrai que le sujet n'est pas a priori ce qui va le plus tenter le lecteur de manga, puisqu'il va y être question de rakugo, un art théâtral typiquement japonais et très particulier. En effet, le rakugo est un spectacle qui tient à la fois du conte et du mime, où un conteur seul en scène assis en kimono sur un coussin, doit jouer une saynète souvent humoristique en s'aidant de quelques objets, toujours les mêmes: un éventail et une serviette pliée.
Le lecteur va découvrir cet art un peu oublié via l'aventure de Shota, 26 ans, animateur dans une maternelle que dirige sa tante, qui en cherchant une idée pour occuper les enfants dont il a la charge, tombe sur un livre " apprendre le rakugo en s'amusant". Ce n'est pas vraiment un succès, et une gamine lui dit pourquoi " vos personnages, on n'y croit pas du tout". Il faut dire que pour Shota, le rakugo, c'est un truc un peu ringard qui passe tous les dimanches à la TV. Mais lorsque sa tante l'emmène voir au théâtre du vrai Rakugo, c'est le choc. Non seulement il va pouvoir proposer des animations plus vivantes à sa classe, mais rencontrer le grand père d'une de ses élèves, qui qui propose de venir faire aussi des animations pour son club du troisième âge, car peu importe l'âge , tout le monde a besoin de se distraire et de rire un bon coup.
Shota qui hésitait à poursuivre dans l'enseignement vient de se trouver une nouvelle passion, et décide de tout plaquer pour en faire son métier, commençant par faire des pieds et des mains pour que Doraku Sekishuntei, l'auteur du livre qu'il a lu, le prenne comme apprenti. Ce premier tome couvre sa découverte, son initiation, jusqu'à sa première scène en tant que zenza, apprenti conteur.
Sa découverte ne va pas sans stupéfaction, car le rakugo dérive d'une ancienne tradition bouddhiste, d'où le rituel qui va avec, le fait que l'apprenti doit avant tout commencer par apprendre à plier le kimono et faire le ménage ( et Shota est plutôt fâché avec), jouer des percussions pour accompagner l'entrée des conteurs en scène, accompagner le maitre conteur quand il se produit ( ce qui est aussi l'occasion de faire des connaissances utiles et d'assister aux représentations, car le conte est avant tout un art oral qui repose sur la mémoire plus que sur des textes écrits). Doraku est un maître exigeant, qui râle beaucoup, mais plus parce qu ça fait partie du métier que par mauvais caractère, au contraire , il est plutôt sympathique et farfelu ( du genre à jouer de la guitare électrique, un casque sur les oreilles, en kimono. Je note aussi qu'il est fan des Beatles, de Clapton et de King Crimson, et ce dernier détail lui vaut toute ma considération).
J'aime aussi énormément le grand-père avec qui Shota sympathise au début du manga, et évidemment Dorami, qui avec ses cheveux en pétard et ses allures de garçon manqué est une des seules femmes à apprendre le rakugo. Et c'est la que doraku apparaît sympathique: le fait qu'elle soit une file ne lui pose aucun problème, ce qui n'est pas le cas de tous ses collègues, et Dorami a la vie dure dès qu'elle croise un autre maître rakugoka.
Le dessin est classique, limite épuré ce qui va bien avec le sujet, mais aussi souvent expressif, et ça fait bien plaisir à voir. J'ai beaucoup aimé cette plongée pleine de bonne humeur dans un monde inconnu, où tout le monde est "frère" ou "soeur", ou les apprentis se jalousent parfois mais surtout s'entraident beaucoup, et où tout le monde se passionne pour un art de la parole un peu oublié.
Le tome est très gros, relié ( Editions Isan, je les avais vu juste une fois lors d'une Japan expo, sans avoir l'occaiond e m'y pencher vraiment, le catalogue fait la part belle aux seinen classiques, ou sur des thèmes tradtionnels et aux adaptations littéraires, c'est "Madame Bovary" par Yumiko Igarashi, dessinatrice de Candy - mais oui - qui m'avait intriguée lors de l'expo. Et quand je dis intriguée c'est plutôt stupéfaite.) Je vois que le tome 2 est sorti et c'est une bien bonne nouvelle pour moi, hop, sur la liste à lire!
Notons aussi qu'une introduction a été faite pour l'édition française par une troupe théâtrale qui tourne encore en France avec un spectacle de rakugo traduit et adapté en français " histoires tombées d'un éventail". Ils étaient passés il y a 4 ans au festival d'Avignon, mais manque de chance, je n'étais pas là à ce moment et je n'ai pu y aller, mais j'ai gardé le titre en mémoire, en espérant qu'ils reviennent à l'occasion.
Oui Sylvain, c'est prévu, je te l'amène ce mardi :D
RépondreSupprimermais eeuh, si tu fais les réponses avant que je pose les questions, j'sers plus à rien moi.....
RépondreSupprimerJe lis dans tes pensées, c'est tout ( et surtout on en avait parlé en décembre, il a juste mis plus de temps que prévu à arriver chez moi)
SupprimerMerci de me faire découvrir cet art. Je vais chercher à lire ce manga pour en savoir davantage.
RépondreSupprimerUne belle trouvaille.
j'ai le tome 2 en attente, que je lirais probablement après le mois Halloween. Il n'y a que 2 tomes en tout ( très épais) d'ailleurs.
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