La Parfaite Lumière enchaîne donc exactement là où finissait La Pierre et le sabre, à savoir le trio Musashi, Jôtarô son disciple et Ôtsu la femme déterminée en partance pour Edo ( Tokyo), récemment promue nouvelle capitale, où Musashi espère faire carrière. Les trois sont évidemment très vite séparés, et on retrouve la structure du premier volume, à savoir les histoires parallèles des principaux personnages sur une durée de plusieurs années. Musashi va continuer son périple, prendre un nouveau disciple en la personne de Iori, petit paysan orphelin et débrouillard, être tenté par une carrière officielle au service d'un haut fonctionnaire, mais rester finalement rônin, jugeant qu'il ne pourra se perfectionner sur la Voie du sabre qu'en gardant son indépendance.
Ôtsu, d'abord rattrapée par son ancien fiancé, le pitoyable Matahachi, passe pas mal de temps au second plan du récit, pour ne revenir que sur la fin, sans avoir trop souffert car elle a toujours une chance incroyable qui la met régulièrement à l'abri des coups durs, lui laissant donc l'occasion de se lamenter sur son sort ( l'auteur se fait d'ailleurs plaisir en raillant un peu son personnage par la bouche de Jôtarô qui la recherche car il l'aime bien, bien qu'elle soit toujours d'humeur maussade, toujours en train de pleurer, ce qui n'en fait pas la compagne de voyage la plus agréable).
Jôtarô, ainsi que Matahachi, après quelques péripéties, tomberont dans les griffes d'un personnage très douteux, qui cache sous des dehors avenants et insoupçonnables, de noirs desseins politiques que je tairai ici, pour ne pas vous gâcher un ressort essentiel de l'histoire.Rassurez vous, ils s'en sortiront grâce à l'intervention providentielle de l'indispensable Takuan, toujours prêt à rendre service - à grands coups de pieds au derche si possible.
Ôsugi, la grand-mère de combat reste égale à elle même durant la majeure partie du roman, il est dommage d'ailleurs qu'elle change in extremis dans un retournement de situation à 100 pages de la fin assez peu convaincant il est vrai, qui la voit devenir inséparable d'Ôtsu, qu'elle vient pourtant de tyranniser pendant près de 1300 pages et 2 gros volumes.
Et bien sûr on retrouve l'éternel rival de Musashi, Sasaki Kojirô , dans le rôle du méchant, rongé d'ambition, dont le but unique est d'affronter Musashi en duel. Et bien que l'auteur fasse tout pour le rendre antipathique au possible, hautain, prétentieux, vantard, etc.. je continue à penser que c'est quand même l'un des personnages les plus intéressants ( car plus ambigu, mon monolithique que le héros, justement). Et comme vous le supposez, cet affrontement tant attendu sera la conclusion du roman, je ne vous ferai pas l'affront de vous donner le résultat, les deux protagonistes ayant existé , il est facile de le savoir en consultant n'importe quelle bonne encyclopédie ;)
D'ailleurs, tiens je viens de voir que Genzô Murakami, un autre écrivain, a écrit un roman consacré à Kôjirô, il serait intéressant de voir quel portrait en est fait, par contre, je ne sais pas du tout s'il en existe une traduction en français ou en anglais( apparemment, une chose que ne mentionne pas du tout Yoshikawa, Kôjirô était malentendant, ce qui peut changer l'éclairage quand à l'attitude hautaine et distante que stigmatise Yoshikawa)
L'autre difficulté de ce second volume, c'est le cadre historique: là où le premier était encore assez rural, avec juste quelques repères de noms ou de lieux, le deuxième est plus politique, puisqu'il traite en partie de l'ère Tokugawa, de l'installation du nouveau shogun à Edo, il ya des rebondissements politiques, et il n'est pas toujours évident de s'y retrouver, de savoir qui fait partie du clan Tokugawa, qui soutient le clan Toyotomi, qui fait allégeance à qui ou au contraire, qui complote contre les autres et pourquoi. Bon, l'avantage, c'est que le système politique est tellement complexe, à la fois féodal et incroyablement administratif, que maintenant, j'ai très envie d'en savoir plus sur cette période charnière.
En effet, et ça c'est une des forces du roman qui délaisse assez régulièrement le monde des samouraï et des courtisans pour s'intéresser à celui du peuple: paysans, commerçants, citadins... la société est en pleine mutation, le code d'honneur des nobles est en perte de vitesse au profit d'une caste montante, roturière mais souvent plus riche que les seigneurs: les commerçants. L'action se passe entre 1601 et 1614, donc quelques années avant la politique protectionniste de fermeture du pays, et les échanges commerciaux notamment avec les autres pays d'Asie sont florissants.
Je conclurai donc en disant que ce deuxième volume m'a un tout petit peu moins plu que le premier, par manque de connaissance sur la situation du pays, qui gêne un peu la fluidité de la lecture ( "attends voir, c'est qui lui déjà?" d'autant qu'une palanquée de nouveaux personnages viennent rejoindre ceux déjà présents), et à cause des ficelles narratives qui deviennent un peu trop visible sur les derniers chapitres. On est aussi dans quelque chose de plus philosophique, plus spirituel que ne l'était le début de la formation de Musashi, mais ça reste léger, hein, rassurez-vous encore une fois, il y a quand même une bonne grosse baston toues les 25 pages. Sinon, toujours cette ambiance un peu Dumas un peu western, que j'adore. Pour l'instant, les deux volumes de Musashi sont donc ma meilleure découverte de ce challenge... par contre, indispensable de ne pas laisser trop passer de temps entre la lecture des deux volumes, car il faut raccrocher les wagons immédiatement, car on oublie facilement quelques détails du premier volume si on laisse passer trop de temps. Mais maintenant, en tout cas, j'ai envie d'en savoir plus sur l'ère Edo, le bushido, le zen, les rites shinto, etc...
pour le plaisir et parce que l'action de passe a Edo, une maquette représentant une rue d'Edo, avant qu'elle ne devienne Tôkyô. |
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